12 avril 2012

Rachid Ammar, serait-il notre Général De Gaulle ?


Le Général Rachid Ammar s’est comporté durant les évènements du 14 janvier 2011 d’une manière courageuse et patriotique. C’est un Homme d’exception dans les pays du Sud où les militaires ne manquent aucune occasion pour achever les régimes agonisants -la dernière en date, le putsch au Mali.  Le général Rachid Ammar, pur produit de l’Ecole bourguibienne et authentique républicain est un réel Homme d’Etat.
Qui pouvait croire que cet homme était en mesure de dire non au dictateur et sanguinaire  Ben Ali en refusant ses ordres pour rejoindre les forces de répression de l’appareil «benaliste» afin de mater la révolte déclenchée le 16 décembre 2010 ? Qui osait croire, après la fuite orchestrée de Ben Ali que ce puissant et charismatique Général bouderait le pouvoir et le transmettrait aux civils ? On rêve ! Qui pouvait aussi imaginer qu’il était capable d’arrêter le puissant Seriati et maîtriser son appareil policier sans le moindre dégât ? Inimaginable ! Sans pouvoir formel, l’Institution Militaire a boosté la fragile autorité civile, peu légitime, pour gérer le pays, durant la première transition, malgré les intrigues, les manipulations golfiques, les faux pas et le bilan mitigé.
L’institution militaire, sous l’autorité du général Ammar, a joué un rôle de premier ordre surtout le 14 janvier 2011 en faisant avorter le coup d’Etat contre la République en dégageant Ben Ali et son clan mafieux. L’Armée tunisienne a compensé, lors de la période de stabilisation sécuritaire du pays, le défaut voire l’absence des forces de l’ordre. Nous devons aussi reconnaitre à l’armée la «réussite» logistique des élections. Nul ne peut nier l’efficacité de cette institution pour défendre le territoire tunisien lors de la crise libyenne.
Le flottement politique actuel pose problème et le pays est réellement menacé d’un effondrement généralisé : économique et sécuritaire faute de dirigeants charismatiques et visionnaires. La légitimité du pouvoir issu des élections s’érode chaque jour et risque, si aucune action courageuse n’est entreprise, de partir en éclats. Pourquoi le gouvernement provisoire ne tranche-t-il pas d’une manière définitive avec cette bande de salafistes-jihadistes qui déstabilise, chaque jour un peu plus, le pays et ses institutions républicaines ? Pourquoi le gouvernement ne démissionne-t-il pas eu égard à son  incapacité à gérer correctement et efficacement le pays ? Pourquoi ce gouvernement confisque-t-il les libertés arrachées  (liberté d’expression et de manifester) par le peuple ? Que cherche-t-il en bâillonnant les médias et matraquant les paisibles journalistes, manifestants et manifestantes ? A-t-il l’intention de supprimer la mémoire collective du peuple et de la résistance contre le colonialisme pour imposer sa réécriture d’une l’Histoire fabriquée afin de raser la République et imposer une autre forme de gouvernance islamique ?
Pour évoquer le général De Gaulle, ce dernier a su, la veille du débarquement en Normandie, éviter à la France sa mise sous tutelle par les Alliés qui songeaient à établir en France une administration militaire sous leurs ordres en attendant que les Français puissent établir un nouveau régime. Le général  De Gaulle a su convaincre le Premier ministre britannique Winston Churchill que depuis l’appel du 18 juin, il assurait, lui, la continuité de l’Etat. Un Général visionnaire a évité à la France perte de temps et humiliation supplémentaire.
On doit retenir de cet épisode de l’Histoire de la France la clairvoyance du Général de Gaulle et la justesse de la feuille de route choisie, résumée dans cet extrait de son discours à Lille le 1er octobre 1940 : «Nous voulons la mise en commun de tout ce que nous possédons sur cette terre et, pour y réussir, il n'y a pas d'autres moyens que ce que l'on appelle l'économie dirigée. Nous voulons que ce soit l'État qui conduise, au profit de tous, l'effort économique de la nation tout entière et fasse en sorte que devienne meilleure la vie de chaque Français et de chaque Française (...). Il faut que la collectivité, c'est-à-dire l'État, prenne la direction des grandes sources de la richesse commune et qu'il contrôle certaines des autres activités, sans bien entendu exclure les grands leviers que sont, dans l'activité des hommes, l'initiative et le juste profit». Voilà une feuille de route qui ne pouvait nullement plaire aux américains, champions du capitalisme et du libéralisme et pourtant soutiens essentiels  de la France sous l’Occupation par l’Allemagne hitlérienne. Le Général De Gaulle, Homme d’Etat, a eu le courage de sauver la France en fonction de l’intérêt de celle-ci, prenant en considération les exigences du moment en accord avec les patriotes et résistants de l’intérieur du pays.
Exemple à méditer non dans la forme mais dans le fond. La Tunisie va mal et les perspectives se rétrécissent voire s’éclipsent au profit de l’anarchie et de la dictature. La Tunisie a besoin d’une vision et d’une révision totale des choix socio-économiques hérités de la mafia Ben Ali. Elle doit revenir aux fondamentaux privilégiant les services publics et une réelle distribution des richesses pour plus de justice et d’efficacité et repenser la vente de nos fleurons industriels et économiques cédés au capital étranger et/ou à des sociétés-écrans. Comment comprendre et accepter qu’aucune des lois votées sous Ben Ali par un Parlement acquis n’ait été remise en cause, surtout celles octroyant des avantages illimités à la «cour» et aux courtisans ?  Pourtant la Révolution est née de la volonté de supprimer ces privilèges auto-attribués.
Le Général Ammar est-il, encore, cette fois-ci, au rendez-vous pour soutenir une nouvelle feuille de route citoyenne et participative en phase avec les objectifs de la Révolution ? Lui qui aurait dit : «Je vais bientôt siffler la fin de la récréation». Récréation signifiant pour nous incompétence, amateurisme, gabegie, diversion, obscurantisme, absence d’ouverture sur le futur, bref décomposition de la République au bénéfice du chaos et de la dictature pour masquer ladite récréation ! Peu importe la polémique surgie à partir de cette célèbre phrase ! Il conviendrait de dire ou plutôt de proposer un autre cheminement pour sortir la Tunisie de l’impasse et des risques d’implosion, de guerre civile, d’autant plus que l’insécurité s’installe à nos frontières et nous encercle. Cette tâche est du ressort des hommes exceptionnels. Le Général Rachid AMMAR, serait-il l’un d’entre eux ? Tout laisse à le croire!
Mustapha STAMBOULI, républicain