18 février 2016

Taux de chômage en Tunisie : mensonge ou réalité !

La Tunisie a connu ces derniers temps une secousse sociale d’une amplitude inquiétante suite à la révolte des chômeurs dans les zones dites démunies, essentiellement dans les gouvernorats de l’Ouest du pays. Cette crise est-elle spontanée ou un remake raté de décembre 2010 ? Tout laisse à penser que les acteurs qui ont tiré les ficelles de la révolte de 2010-2011 sont les responsables de la dernière jacquerie. Pourquoi ces derniers ont-ils agi maintenant pour secouer le pouvoir en place ? La crise libyenne a-t-elle suggéré ce mouvement de revendication ? Peu importe les agissements des uns et l’incompétence du pouvoir en place, la question du chômage doit être élucidée afin de voir clair et établir une stratégie pouvant résoudre définitivement cette équation à multiples inconnues.


La Tunisie a-t-elle vraiment un surplus ingérable de main-d’œuvre ? Le présent article cherchera à donner un nouvel éclairage sur la situation réelle concernant l’ampleur du chômage en Tunisie.
Le chômage est défini comme l'état d’inactivité d’une personne souhaitant travailler et ayant plus de 16 ans et moins de 60 ans. Les frontières entre emploi, chômage et inactivité ne sont pas toujours faciles à établir, ce qui laisse une forte spéculation autour du chômage.

Officiellement et d’après l’INS, le nombre de chômeurs est établi fin décembre 2015 à 618.800 personnes donnant ainsi un taux de chômage de 15,38 % (fin 2015), sachant que la population active dans le secteur formel est évaluée à un peu plus de 4.020.800 millions de personnes (dont 3 millions dans le secteur privé) générant un PIB de 82,5 milliards de dinars. Par ailleurs, le secteur informel avec 40 milliards de dinars générerait plus de 2.171.232 millions d’actifs non déclarés. Ainsi, il est légitime de redresser le taux de chômage en tenant compte de l’ensemble des actifs (formel et informel), ce qui nous donne un taux de chômage de 9,99 %.

Selon la Banque mondiale, le secteur informel est estimé à 54% de la main-d’œuvre soit 524.000 micro-entreprises, représentant 35% du tissu entrepreneurial.

Par ailleurs, la population de plus de 60 ans et celle de moins de 16 ans est estimée à 3.850.210 millions. A cet effectif de la population non active, il faut ajouter la population estudiantine (public et privé) évaluée à 340 000 personnes. Le nombre de femmes au foyer volontairement est estimé à 400.000. La consolidation de tous ces chiffres donne un total de 10.782.242. La différence entre ce chiffre et celui de la population totale (10.982.754) est de 200.512 personnes. Ainsi le taux de chômage réel serait de 3,24% et non 15,38%. Alors pourquoi parle-t-on de 600.000 demandeurs d’emploi ?

Pourquoi enregistrons-nous un tel écart entre le chômage réel et le chômage supposé ? Les autorités compétentes en matière de recensement doivent affiner leur méthode d’estimation et nous éviter cette cacophonie inutile.

L’institution militaire pourrait, à elle seule, engager ces personnes à la recherche d’emploi si on l’autorise à agir dans le secteur productif (infrastructures, agriculture, environnement). Cette stratégie pourrait sortir l’Ouest tunisien de sa pauvreté qui a trop duré !


Pourquoi ne pas confier l’exploitation des 410000 hectares des terres domaniales abandonnées à l’Armée nationale en attendant de trouver une solution pérenne à ces terres ? Notre littoral est réellement menacé par les constructions anarchiques et nos ressources halieutiques sont en voie de disparition, l’Etat tunisien doit charger l’Armée nationale de préserver cette richesse nationale. Ces deux missions de préservation des terres domaniales et notre littoral peuvent utiliser plus de 100.000 jeunes engagés. Seul l’immobilisme pourrait empêcher la bonne gouvernance de nos ressources humaines et naturelles …

A la lumière de cette brève analyse, notre pays risque de connaitre une crise grave de pénurie de main d’œuvre dans les prochaines années si on ne fait rien pour relancer la croissance démographique, réformer l’enseignement et la formation professionnelle. Le règlement de la crise libyenne et l’ouverture du marché algérien du travail favoriseront à coup sûr le départ de plusieurs centaines de milliers de jeunes vers nos deux voisins maghrébins. Faute d’une politique nataliste et une volonté de reformer l’Ecole républicaine, la Tunisie sera obligée de faire venir des égyptiens, des maliens et des tchadiens pour la construction de notre pays.

Mustapha STAMBOULI


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