C’est à l’âge de douze ans, entourée de deux camarades
d’école avec qui elle partage un intérêt très prononcé pour la « chose
politique », que Chahdortt Djavann assiste à l’arrivée au pouvoir de
Khomeiny, en 1979.
Jusqu’alors, elle et ses deux amies, audacieuses ou
insouciantes, se livraient à des réunions clandestines communistes à l’insu de
leurs parents… Mais le cours des choses prend une tournure de plus en plus
grave et répressive.
Chahdortt échappera aux massacres perpétrés par les
intégristes, mais ce ne sera hélas pas le cas de tous ses condisciples…
Partie étudier à Paris à l’âge de 24 ans, elle revient
saluer ses proches en 1998… Mais elle se heurtera à un Iran guère plus juste
que deux décennies plus tôt…
Allant de pair avec l’émergence de la révolution
iranienne, de l’intégrisme islamique et d’un régime totalitaire terrifiant
comme ils le furent/sont tous, le règne de Khomeyni inspira à l’auteure ce
premier roman.
Je
viens d’ailleurs est le témoignage froid et digne d’une femme qui assista
aux dérives de plus en plus flagrantes de sa nation.
On
s’instruit des faits qui ont eu lieu durant cette révolution qui rappelle
vaguement l’horreur du roman 1984, et l’on s’étonne que de pareilles
choses aient pu réellement exister. Je pensais cependant en apprendre davantage
sur les structures de pensée d’un membre d’une autre culture en lisant cet
ouvrage… Et non, j’ai compris les opinions et émotions de la narratrice comme
si elle avait été Européenne. Peut-être s’est-elle approprié en un sens un peu
de notre culture en émigrant en France?
Chahdortt Djavann pose un regard quasi
occidental/distancié sur les jeux de pouvoir de son pays d’origine et dispose
d’une soif de liberté et de justice intarissable. Traits peu communs, je crois,
et éloignés des perceptions de ses compatriotes dont on a souvent l’impression,
à la télévision, qu’ils ne conscientisent pas l’ampleur de leur aliénation
(mais je peux me tromper).
Ce
livre est agréable à lire. Je viens
d’ailleurs permet avant tout de
prendre pleinement connaissance du terrible fardeau qu’a connu et que connaît
vraisemblablement encore l’Iran aujourd’hui.
Biographie de Chahdortt Djavann
Chahdortt Djavann se
dit être 'née révoltée'. Née révoltée car elle est née femme dans un pays où
les femmes n'ont pas le droit d'exister. Elle grandit à Téhéran où
elle vit avec sa mère et ses quatre frères et soeurs aînés. Son père, Pacha Khan, est emprisonné par le shah, après
la révolution de 1979. Enfant déjà, Chahdortt n'avait pas sa langue dans sa
poche, et malgré un régime
terrifiant, elle a une conscience aiguë de la liberté. Véritable garçon manqué, elle dérange. Très jeune, c'est l'exil :
après être passée par Istanbul, elle
atterrit à Paris en 1993. Ne parlant pas français, elle a connu des conditions
de vie difficile, enchaînant les jobs précaires avant de rentrer à l'Ecole des
hautes études en sciences sociales, où elle étudie l'anthropologie. En 2002,
elle publie son premier roman, 'Je viens d'ailleurs' et raconte, dans la langue
de Voltaire, comment elle a gardé la
tête haute.