14 janvier 2012

Je viens d’ailleurs / Chahdortt Djavann


C’est à l’âge de douze ans, entourée de deux camarades d’école avec qui elle partage un intérêt très prononcé pour la « chose politique », que Chahdortt Djavann assiste à l’arrivée au pouvoir de Khomeiny, en 1979.
Jusqu’alors, elle et ses deux amies, audacieuses ou insouciantes, se livraient à des réunions clandestines communistes à l’insu de leurs parents… Mais le cours des choses prend une tournure de plus en plus grave et répressive.
Chahdortt échappera aux massacres perpétrés par les intégristes, mais ce ne sera hélas pas le cas de tous ses condisciples…

Partie étudier à Paris à l’âge de 24 ans, elle revient saluer ses proches en 1998… Mais elle se heurtera à un Iran guère plus juste que deux décennies plus tôt…
Allant de pair avec l’émergence de la révolution iranienne, de l’intégrisme islamique et d’un régime totalitaire terrifiant comme ils le furent/sont tous, le règne de Khomeyni inspira à l’auteure ce premier roman.
Je viens d’ailleurs est le témoignage froid et digne d’une femme qui assista aux dérives de plus en plus flagrantes de sa nation.
On s’instruit des faits qui ont eu lieu durant cette révolution qui rappelle vaguement l’horreur du roman 1984, et l’on s’étonne que de pareilles choses aient pu réellement exister. Je pensais cependant en apprendre davantage sur les structures de pensée d’un membre d’une autre culture en lisant cet ouvrage… Et non, j’ai compris les opinions et émotions de la narratrice comme si elle avait été Européenne. Peut-être s’est-elle approprié en un sens un peu de notre culture en émigrant en France?
Chahdortt Djavann pose un regard quasi occidental/distancié sur les jeux de pouvoir de son pays d’origine et dispose d’une soif de liberté et de justice intarissable. Traits peu communs, je crois, et éloignés des perceptions de ses compatriotes dont on a souvent l’impression, à la télévision, qu’ils ne conscientisent pas l’ampleur de leur aliénation (mais je peux me tromper).
Ce livre est agréable à lire. Je viens d’ailleurs permet avant tout de prendre pleinement connaissance du terrible fardeau qu’a connu et que connaît vraisemblablement encore l’Iran aujourd’hui.

Biographie de Chahdortt Djavann

Chahdortt Djavann se dit être 'née révoltée'. Née révoltée car elle est née femme dans un pays où les femmes n'ont pas le droit d'exister. Elle grandit à Téhéran où elle vit avec sa mère et ses quatre frères et soeurs aînés. Son père, Pacha Khan, est emprisonné par le shah, après la révolution de 1979. Enfant déjà, Chahdortt n'avait pas sa langue dans sa poche, et malgré un régime terrifiant, elle a une conscience aiguë de la liberté. Véritable garçon manqué, elle dérange. Très jeune, c'est l'exil : après être passée par Istanbul, elle atterrit à Paris en 1993. Ne parlant pas français, elle a connu des conditions de vie difficile, enchaînant les jobs précaires avant de rentrer à l'Ecole des hautes études en sciences sociales, où elle étudie l'anthropologie. En 2002, elle publie son premier roman, 'Je viens d'ailleurs' et raconte, dans la langue de Voltaire, comment elle a gardé la tête haute.