L'absence d'un système d'information fiable et pérenne
pousse le Forum économique mondial (FEM) de Davos à éjecter la Tunisie hors
classement de la compétitivité mondiale! C’est pour la première fois depuis
1971, date de création de ce Forum, la Tunisie ne figure pas sur «Global
Compétitivités Report, GCR». Un rapport tant attendu et analysé par les
grands investisseurs et décideurs de la planète. Notre «radiation» de ce
classement que nous espérons provisoire, est un mauvais signal pour tous les
investisseurs, étrangers en particulier !
Alors que la classe politique est occupée de prendre position sur la fin de légitimité de l’actuelle transition qui prend fin le 22 octobre prochain, le «World Economic Forum (WEF) de Davos » vient d’annoncer ce mercredi 5 septembre l’éjection de la Tunisie du classement de la 42ème édition du WEF, sachant que 144 pays sont retenus pour ce précieux classement, même l’Egypte, la Libye et le Yémen, pourtant dans la même situation « postrévolutionnaire » que notre pays, n’ont pas été écartés de l’évaluation. La Tunisie était pourtant classé 40ème en 2011 et 32ème en 2010. Un séisme secoue les milieux politico-économiques du pays, tout le monde sous le choc !
Pour bien saisir les enjeux de ce Forum, nous donnons
quelques repères : Le WEF de Davos réuni chaque année plus de 1 600
décideurs économiques et politique de la planète ! Officiellement et
d’après ses statuts, le WEF, est une fondation "indépendante,
impartiale et à but non lucratif (…) qui ne défend aucun intérêt politique,
partisan ou national". Le Forum a été fondé en 1971 par le suisse Klaus
Schwab, professeur d’économie. Le WEF est normalement une réunion informelle
qui sert à nouer des liens et à créer des réseaux d’intérêts. Quoique une
rencontre informelle, le WEF a supplanté celle de la réunion annuelle du FMI
qui est ouverte, exclusivement, aux officiels des pays. Le WEF est une
plateforme ouverte aussi bien pour grands de ce monde en matière économique et
financière que pour les délégations officielles des pays.
Le WEF de Davos publie chaque année son classement sur la
compétitivité mondiale. L’objectif de cette enquête planétaire est de bien cerner la capacité de chaque pays
à réaliser une croissance économique durable à moyen et long terme. Ce
classement n’est nullement une évaluation de l’année en cours. C’est un
exercice prospectif pour jalonner le futur de chaque pays afin d’aider
les investisseurs de prendre des options et des décisions d’investissement.
La définition généralement retenue de la compétitivité d’une
nation est la capacité à améliorer durablement le niveau de vie de ses
habitants et à leur procurer un haut niveau de revenu et de cohésion sociale. La
compétitivité se mesure par un indice composite résultant d’une moyenne
pondérée de 110 variables extrêmement diverses (indicateurs macroéconomiques,
infrastructures, qualité du système éducatif, situation sociale, intensité de
la recherche et du développement…). Cette intégration de données doit permettre
de prendre en compte tous les «facteurs permettant aux économies nationales
d’atteindre une croissance économique soutenue et une prospérité à long terme».
Pour rendre possible l’agrégation de données hétérogènes, tous les résultats
sont convertis sur une échelle de notes de 1 à 7. Ces 110 notes sont ensuite
regroupées en 12 catégories appelées «piliers», eux-mêmes répartis entre trois
grands «sous-indices». Un système complexe permet de résumer un territoire en
un chiffre.
Revenons au cas tunisien et à l’humiliation Subie ! Trois raisons
fondamentales ont poussé le WEF à
refuser l’évaluation des performances de notre pays pour 2012-2013 : (1)
l’instabilité sécuritaire et politique du pays, (2) les soupçons persistants sur
la fiabilité des informations provenant des institutions officielles et (3) l’absence
d’une politique économique claire de l’actuel gouvernement. Une trilogie
négative a convaincu les experts de ce Forum pour ne pas procéder à l’exercice
de classement de notre pays dans son système d’évaluation des performances des
pays, (4) un système d’enseignent archaïque et peu performant a contribué à
cette décision.
(1) Il n’est pas difficile pour un observateur étranger de se rendre compte de l’inefficacité du système
politique mis en place après le 23 octobre dernier : la Tunisie est
complètement désorganisée, le peuple subit depuis plusieurs mois intimidation,
intoxication et tyrannie des salafistes-obscurantistes: (i) la Constitution
promise n’est pas prête et sa rédaction a divisé le peuple tunisien au lieu
l’unir. Les articles multiples du projet de la constitution remettant en cause
les libertés individuelles et collectives et le droit des Femmes ont crée un
climat de suspicion peu favorable à la recherche d’un consensus nationale pour
sortir le pays du désert constitutionnel ; (ii) l’échec de l’action
gouvernementale est flagrant sur tous les plans : (a) l’économie est au
bord de la faillite et de la banqueroute : nos déficits commerciaux et des
paiements nous rappellent une autre période sombre de notre histoire, celle des
années 1985.
(2) La fiabilité des informations provenant des institutions
officielles est sujette au doute surtout après limogeage arbitraire, en mois de mars
dernier, du Directeur général de l’Institut National de la Statique (INS). Le
gouvernement reprochait à l’INS la publication des mauvaises statistiques qui
donnait des chiffres catastrophiques sur l’inflation avec un taux de
5,7%. L’autre limogeage concernant le gouverneur de la Banque Centrale a été
interprété par le monde des finances en Tunisie et à l’étranger comme une
volonté de créer de la croissance artificielle par la planche à billets !
(3) Le manque de visibilité économique, la mauvaise gouvernance
publique et l’absence de décision pour redresser les caisses de retraite au
bord de la faillite et la caisse générale de compensation qui plombe le budget
de l’Etat avec 6 Milliards de Dinars ont convaincu l’institution de Davos d’oblitéré la Tunisie de son exercice de
classement.
(4) Il n’est pas étonnant si le Forum de Davos refuse d’évaluer la
compétitivité de l’économie tunisienne : la Tunisie ne figure pas dans le
classement des meilleures 500 universités dans le monde, selon le dernier classement
établi. Le savoir et la recherche, deux piliers fondamentaux pour le
développement économique et social !
L’Institut Arabe des Chefs d’Entreprises (Iace) est dans
tous ses états suite à cette décision inattendue, inopportune pour le développement
de la Tunisie. C’est une sanction sévère qui risque de tarir l’investissement
étranger. On n’est pas loin de la catastrophe !
On peut bien sûr contester une telle décision arbitraire,
surprenante voire partisane. Mais on ne peut pas ne pas reconnaître que le pays
est mal géré, que les fondamentaux économiques sont au rouge, que la vision est
bouchée et que rien ne prédit une amélioration dans les mois à venir. Une personne
est particulièrement responsable de cette situation dramatique de la Tunisie :
le président des présidents, l’homme au pouvoir illimité et absolu qui espère
installer un pouvoir théocratique dans lequel il aura la fonction du guide
suprême de la Révolution du jasmin, un Khomeiny du 21ème siècle. La
Tunisie ne pourra retrouver sa place dans le concert des Nations et sa
compétitivité économique et territoriale qu’à partir du moment où le peuple
dégagera cette PNG.
Mustapha STAMBOULI