Les trois pays arabo-africains du printemps arabe ont raté
leur mutation démocratique tant attendue. Explication principale : ces
révoltes légitimes ont été détournées par
les sionistes pour imploser la région arabe en minuscules Etats
incapables de concurrencer ou nuire à Israël:
(1) L’Egypte : après une gestion calamiteuse et un échec
cuisant du pouvoir islamiste, la rue a opté pour un changement radical et a
installé un gouvernement boosté par les militaires pour redonner à l’Etat les
moyens de sauver l’intégrité territoriale du pays et la République et ses
acquis. Quelques soient les critiques sur la méthode, le changement forcé s’avère
salutaire en comparaison avec le marasme installé par les Frères musulmans.
(2) La Libye : Nul n’est surpris par son chaos
sécuritaire. Le peu d’Etat de l’Ere Kadafienne a disparu après le départ
précipité des Forces lâches de l’OTAN. Nous affirmons que la Libye est devenue un
second Irak dans la partie occidentale du Monde Arabe. Cette seconde
articulation et plateforme de déstabilisation régionale aurait pour objectif de
justifier dans le futur des opérations militaires en Libye-même et certainement
en Afrique du Nord, l’Algérie en particulier. Notre voisin du Sud a de fortes
chances d’être balkanisée dans le cadre de sa future pacification imposée.
(3) La Tunisie : ratage de toutes ses transitions,
faits dont la classe politique entière est
responsable. La décision politique tunisienne n’appartient plus aux «tunisiens».
Américains, Français et Allemands se déchirent pour imposer un régime favorable
à leurs diktats. Si la Tunisie n’arrive pas à trouver sa «solution», pourtant si
simple, c’est parce que la question du «printemps algérien» n’est pas encore
tranchée …
L’absence de consensus sur toute les questions intérieures
et extérieures pourrait imploser notre pays et aboutira in fine à une
révolte-Jacquerie semant le chaos et invitant des forces étrangères à «stabiliser»
la Tunisie. Le scénario malien revisité est à l’ordre du jour. Les visites des
officiels tunisiens en France confirment cette éventualité. La France
n’accepterait pas que notre pays, si proche de l’Europe, se transforme en une
«station» de formation de terroristes-jihadites. Cette probable intervention
aurait un prix : une colonisation déguisée. La Tunisie risquerait de se
transformer en zone offshore où le capital étranger deviendrait roi. Un
dinar dévalué de 50 à 80%, une main-d’œuvre bon marché (100 $ le smig) – moins
chère que la main-d’œuvre asiatique ou indienne. Le coût de notre errance durant
3 ans, trop élevé, sera refusé par le peuple. Seul un régime
néo-facho-dictatorial pourrait faire face à cette situation néocoloniale.
Triste et douloureux bilan du printemps arabe : une
destruction systémique des acquis et le retour à la case-départ.
L’Egypte, malgré les apparences, ne retrouverait plus des
conditions favorables pour résoudre ses problèmes économico-politiques et
sécuritaires tant que la question palestinienne demeure. Au bout du compte, il
est fort probable que le pays de Nasser se « soudanisera» pour affaiblir
définitivement l’Egypte et permettre de créer un foyer sûr pour les Coptes
d'Egypte menacés par la horde jihadiste.
La Libye est prête pour être sous mandat onusien, le temps
de pomper pétrole, gaz et autres minéraux utiles pour l’industrie occidentale.
Allons-nous accepter ce scénario catastrophe qui
transformerait l’africain du Nord en esclave des temps modernes ?
Potentiellement, la Tunisie est en mesure de faire avorter
ce complot diabolique si sa veille génération accepte de rentrer chez-elle et d’y
rester et de laisser moins vieux et jeunes gérer la «Maison Tunisie».
Notre pays constitue le verrou de l’Afrique du Nord pouvant
résoudre le problème libyen avec l’appui de l’Algérie et de l’Egypte. La
Tunisie devra peser rapidement sur le processus de pacification et de
réconciliation en Libye, condition primordiale de la stabilisation de notre
propre pays. La Tunisie pourrait être à même de pousser les libyens vers une
solution pérenne qui préserverait les intérêts du peuple libyen et ceux de
leurs voisins.
La Tunisie a besoin d’un exécutif fort, appuyé par
l’ensemble des Forces vives de la Nation afin de prendre toutes les décisions
pouvant remettre le pays sur la bonne voie. Cet exécutif nécessite
impérativement une plateforme consensuelle sur les principales problématiques
du pays. Seule une Conférence nationale souveraine, en lieu et place du
dialogue-palabre national peut la lui offrir. La désignation d’un chef de
gouvernement ne constitue que la partie
visible de l’iceberg. La sécurité, le mode de gouvernance à installer pour
pallier à la défaillance du centralisme sont des thèmes méritant un cadrage
clair afin d’éviter perte de temps et
une instabilité dangereuse pour l’unité nationale. Cette conférence Nationale Souveraine (CNS)
serait la nouvelle et l’unique légitimité légale. Que l’Assemblée Constituante fasse
un geste patriotique et cède son pouvoir à la CNS afin que cette dernière
puisse redresser le pays sur une
nouvelle base prenant en compte les expériences du passé lointain et proche.
Un exécutif compétent soutenu par toutes les forces
politiques et sociales pourrait créer la surprise sur le plan régional. Il
serait capable de rapprocher les points de vue algéro-marocains et insérer
l’Egypte dans le giron maghrébin, l’une des conditions pour pacifier la Libye et y
favoriser la consolidation de la nation
et d’une administration. Une Libye stable aiderait à relancer la coopération
libyo-maghrébine et pérenniser les échanges.
Laisser Israël, par le biais de l’OTAN ou d’autres
puissances de nuisance, redessiner la nouvelle carte politique de la région
arabe est un scandale historique, une lâcheté sans limite, une trahison
impardonnable.
L’Afrique du Nord, de l’Egypte à la Mauritanie a besoin
d’une Tunisie stable, forte et clairvoyante pour éviter le chaos, le malheur
dans la région. Notre classe politique doit comprendre cette évidence. Elle
doit céder le pouvoir par des mécanismes transparents à la génération post-indépendance.
Selon nous, aucune classe politique n’a survécu à une faillite-banqueroute.
La catastrophe à venir doit balayer à jamais dans le discours et les actes tous
les gourous de la classe politique et nous obliger à trouver dans l’urgence la
feuille de route la plus opportune vu les circonstances gravissimes. Faute de quoi, le peuple tunisien pourrait opter,
dans un proche avenir -la loi de finances anachronique/irréfléchie aidant- pour
la désobéissance civile, arme à double tranchant. Cette nouvelle donne
acculerait le pouvoir et l’opposition à revoir toute la stratégie de transition
démocratique avec le risque de précipiter la banqueroute de la Tunisie. Nous
devons faire l’économie de cette confrontation dangereuse dont les conséquences
imprévisibles fourniraient à l’ancien régime et autres forces du mal le bon
prétexte d’un retour au pouvoir - au
profit des mafias de tout genre.
Une évaluation objective des actions prises durant les trois
dernières années s’impose pour ne plus reproduire les mêmes erreurs. Vouloir
coûte que coûte réaliser des élections médiocres sur des bases fausses dans le
but d’installer une légitimité fragile, (quoiqu’on dise), provoquera fatalement un mécontentement général accompagné d’une déstabilisation
systémique.
En préalable à des élections, il faudrait définir le type de
gouvernance à installer – le centralisme a fait faillite en Tunisie. Seul le
renforcement progressif du pouvoir des communes pour aboutir in fine au pouvoir
local constituerait un cadre novateur pour résoudre l’équation tunisienne en
ouvrant des perspectives par l’implication des citoyens et citoyennes. Optons
résolument pour une démocratie participative et citoyenne. Que la Tunisie soit
une fois de plus à l’avant-garde !
Organiser des élections sans un nouveau recensement général équivaut
à une manipulation abjecte sachant qu’une proportion importante de la
population des zones de l’intérieur s’est déplacée vers les villes du Littoral.
Comment les citoyens de certaines villes du Littoral accepteraient-ils que
leurs représentants-tes à tous les niveaux (au parlement et aux conseils
municipaux) ne soient pas originaires de leurs villes ? Le risque est
réel… Le code électoral et l’établissement des listes de la masse électorale
doivent tenir compte de cette situation fort sensible afin d’éviter une
représentation truquée avec comme corollaire des affrontements post-électoraux.
A notre avis et en tenant compte de ce qui précède, des
élections justes pourraient se tenir d’ici 3/4 ans, le temps d’effectuer correctement
le recensement général des populations, l’organisation de la Conférence Nationale Souveraine et de ses
Etats généraux sur les questions-clés (rédaction de la Constitution, décentralisation
du pouvoir, Caisse de compensation, éducation nationale, bases d’un nouveau
schéma national d’aménagement du territoire, etc.)
Les femmes et les hommes compétents, patriotes, capables de
redresser le pays sur une base démocratique ne manquent pas ! Les vieux
routards de la politique tunisienne doivent comprendre cette donnée essentielle,
sinon, la loi devrait écarter ces gens assoiffés de pouvoir et des avantages inhérents.
Une consultation populaire sous la forme d’un référendum pourrait régler cette
question. Nous considérons que l’âge limite pour postuler un mandat politique
doit être fixé à 70 ans. Le peuple tunisien est fatigué d’attendre et de voir
les mêmes têtes avec les mêmes divagations idéologiques depuis plus de 50 ans.
Basta …
Mustapha STAMBOULI