Le
plan « Jasmin» de sauvetage de l’économie tunisienne se
base sur une stratégie archaïque et perdante car il invite à approfondir l’accord de libre-échange
avec l’Union Européenne, ainsi qu’à accélérer l’influence des IDE non-exportateurs sur l’économie
tunisienne. Cette stratégie prônée et exécutée via la vente des "bijoux
de famille"
(cimenteries, cession d’une
part importante du capital de Tunisie Télécom, concessions de téléphonie,
banques, assurances, tourisme, etc..) essentiellement par Ben Ali sous pression des institutions internationales
risque de poser de sérieux problèmes pour la balance des
paiements de la Tunisie. Des études récentes se basant sur les statistiques de l’INS
montrent que, pour la période comprise entre 2000 et 2008,
les
dividendes exportés ont été multipliés par 3,47 alors que le PIB ne l’a été que
par 1,85.
Cette
situation résulte d’une politique de liquidation de tous les projets rentables
au profit de l’investissement direct étranger. Ces IDE non-exportateurs
participent à l’endettement et creusent le déficit de la balance des paiements.
Ces IDE fabriquent l’appauvrissement du pays. Est-ce un hasard ou une pratique mûrement
réfléchie par Ben Ali et son clan ? Les tunisiens se demandent si ces investisseurs étrangers sont des
sociétés-écrans servant d’abri au clan mafieux. Un audit indépendant devra être
mené au plus vite pour connaître la vérité sur
ces IDE. A son insu, le peuple tunisien serait en train de payer environ
2 Milliards de dollars par an en tant que bénéfices exportés des IDE au profit
du clan Ben Ali et lui permettre un exil doré. L’Etat tunisien devrait s’atteler
sérieusement à cette question des IDE, car sont en jeu sa crédibilité et
l’intérêt national. La Tunisie est en droit de nationaliser les entreprises
cédées d’une manière peu transparente aux investisseurs soi-disant étrangers.
« L’acceptation
des investissements extérieurs non exportateurs et l’autorisation d’exporter
leurs profits à l’étranger (lois de 1993 et 1997) est une régression par
rapport à la réappropriation par la Tunisie des profits de son économie,
réappropriation engagée à la fin des années 50 par Bourguiba, et qui nous a
permis d’augmenter notre taux
d’épargne, clé du développement efficace de notre économique.
Par ailleurs, l’un des enseignements essentiels
de la crise financière de 2008-2009 c’est celui de la fin des stratégies
économiques fondées sur la stimulation artificielle de la croissance et de la
consommation par l’endettement, de leur caractère illusoire et contreproductif.
L’exemple allemand est édifiant : la rigueur budgétaire loin d’être en
conflit avec cet objectif en devient une condition. Les stratégies de long
terme fondées sur la modération salariale et l’accumulation financière dans le
bilan des entreprises se sont avérées être la meilleure solution pour absorber
le choc de la crise et éviter le gonflement du taux de chômage. De toutes les
façons, si un Etat peut bien compter sur la solidarité à court terme de ses
partenaires, il ne pourra recouvrer sa capacité à long terme de rétablir
croissance économique et capacité de désendettement qu’en développant un
système productif vigoureux et compétitif. De plus, quand on est en situation
keynésienne comme ce fut le cas après la faillite de Lehman Brothers en
septembre 2008, faire face à des chocs de cette ampleur est plus efficace avec
un solde public positif comme l’Allemagne (+0,1% du PIB en 2008, -3,3% en 2010)
que d’être dans la situation de déficit chronique
de la France (-3,3% du PIB en 2008, -7% en 2010).
L’exemple irlandais montre bien que la mise en œuvre de la solidarité européenne combinée à une politique de rigueur assumée crée les conditions de la croissance (+1,6% au 2e trimestre), notamment par les exportations (+25%). Inversement, les doutes sur la solidarité financière européenne et les contretemps de la mise en œuvre des mesures grecques de redressement (privatisations, réductions de dépenses) alimentent le scénario de la faillite et de la dépression.
Ce
qui se passe actuellement au niveau financier mondial, c’est
un braquage organisé avec la complicité des gouvernements en place qui
participent à ce gigantesque transfert de richesses des pays attaqués par le
FMI vers les caisses de Wall street et les banques privées européennes.
Mais
là le braquage international prend une autre dimension puisqu’il a deux
finalités bien précises: s’emparer des stocks d’or mondiaux et faire main basse
sur le patrimoine des pays. Rien de moins! Ce que l’on demande à la Grèce en
échange de lui fournir quelques milliards qui ne serviront strictement à rien
si ce n’est à continuer d’acheter des armes au complexe-militaro-industriel (un
scandale en ce temps de crise pour le peuple!) et à rembourser les banques, est
de vendre son patrimoine. C’est ce que le FMI appelle " accentuer les réformes".
Pour
nous protéger et éviter la réédition des abus et délits précités, la Tunisie
devra, à l’occasion de la rédaction de sa Constitution, établir un système
coercitif sans faille. Elle devra aussi se protéger des vautours du système
capitalistique en adoptant des dispositions fermes et simples dans la
Constitution prévoyant : i-l’interdiction du déficit public, seul moyen
pour nous éviter gaspillage et projets "bidons"
et nous permettre d’avoir un meilleur recouvrement fiscal en criminalisant la
fuite fiscale ii- l’obligation pour la Banque Centrale de garantir un solde
positif, au pire nul, de l’encours de la balance des paiements, unique paravent
de notre souveraineté et indépendance nationale. Ainsi, ces deux règles d’or, garde-fous
constitutionnels, génèreront une nouvelle conception de développement
économique et social fondée sur une juste redistribution des richesses du pays et
l’épargne nationale afin de nous éloigner du cercle infernal de
l’endettement, porte ouverte au néocolonialisme et à l’asservissement du peuple
tunisien.