Le FMI, sans le dire clairement, exige de la Tunisie un programme de réformes structurelles (PRS), cousin
des PAS des années 80 et 90 pour redresser une économie à la dérive, des
finances publiques en déficit continu et une balance des paiements qui accuse
un redoutable recul pouvant remettre en cause l’indépendance du pays et l’exposer
aux prédateurs golfiques !
Chaque année le Fonds monétaire international établit par ses experts un rapport par pays sur les conditions et l’évolution de la situation économique et financière des pays membres. Un rapport simple dans sa structure, sobre dans sa forme, expose les principales constatations et recommandations d’une évaluation externe et «indépendante» : (1) un état de fait relevant les évènements majeurs sur le plan politique et social, (2) un inventaire condensé des principaux indicateurs socio-économiques et financiers, données généralement fournies par les différentes administrations du pays (3) des conclusions des administrateurs du FMI sous forme de recommandations pour le pays. Cette synthèse est livrée par la Directrice générale de cette institution.
Ramenons cet exercice à la Tunisie :Chaque année le Fonds monétaire international établit par ses experts un rapport par pays sur les conditions et l’évolution de la situation économique et financière des pays membres. Un rapport simple dans sa structure, sobre dans sa forme, expose les principales constatations et recommandations d’une évaluation externe et «indépendante» : (1) un état de fait relevant les évènements majeurs sur le plan politique et social, (2) un inventaire condensé des principaux indicateurs socio-économiques et financiers, données généralement fournies par les différentes administrations du pays (3) des conclusions des administrateurs du FMI sous forme de recommandations pour le pays. Cette synthèse est livrée par la Directrice générale de cette institution.
(1) le FMI est inquiet quant à la gouvernance actuelle du pays et
surtout de son économie. Il insiste lourdement sur l’indépendance de la Banque
centrale et lance un avertissement au nouveau locataire de la BCT pour garantir
la transparence et l’impartialité de l’institution et l’assainissement du
système bancaire tunisien lourdement atteint par la mafia du régime dégagé. Les
administrateurs du FMI encouragent la libéralisation du système de change afin
sauvegarder les réserves stratégiques en devises !
(2) Le FMI tire le signal d’alarme sur le gonflement de la fonction
publique qui voit ses effectifs grossir de plus 60 mille postes en l’espace de
15 mois pour atteindre 591.000 personnes soit 5,37% de la population. C’est une
fonction publique pléthorique qui menace sérieusement le budget de l’Etat et
l’efficacité même de l’Administration. Le FMI exige une restructuration de ce
dinosaure pour ramener la proportion des fonctionnaires par rapport à la
population à 2,5 à 3 %, comme il est d’usage dans les pays normalement gérés,
faut de quoi, rien ne pourra se faire pour réduire le déficit budgétaire qui
risque d’atteindre cette année des proportions catastrophiques de 9 à 10 %.
(3) Le FMI se félicite du projet de la réforme fiscale proposée par
le gouvernement ! Faut-il croire que l’exécutif a préparé une nouvelle
doctrine fiscale plus libérale sans que personne ne le sache ou bien une manière
de faire taire, pour le moment, cette institution. Pourquoi l’opposition ne
demande-elle pas des comptes sur cette question au gouvernement à travers la Constituante ?
(4) Le FMI, sans le dire clairement, redoute un effondrement du
système de la sécurité sociale si le gouvernement ne procède pas immédiatement à
des réformes urgentes et en profondeur afin d’équilibrer les comptes des
institutions de ce système. Un vaste programme à entamer dans les plus brefs
délais pour éviter à plusieurs centaines de milliers de personnes dépendantes
de ce système de se retrouver marginalisées dans une précarité économique
insupportable.
(5) Nul ne doute que la Caisse de compensation plombe le budget de
l’Etat. On affecte la somme de six (6) milliards de dinars à la compensation
(alimentation, énergie). Ce montant est supérieur au budget de l’investissement
public qui est de l’ordre 5 milliards. Inadmissible et incohérent pour un pays
qui manque de moyens financiers et qui fait appel au marché monétaire
international pour emprunter de l’argent avec des taux relativement élevés eu
égard aux mauvaises notes des agences de notation. Seul
un ciblage des couches marginalisées permettrait aux réels
nécessiteux de bénéficier directement de ces subventions, tout en
allégeant les charges de la caisse.
(6) La liste est longue des réformes à introduire, ce qui autorise
le FMI à réclamer un nouveau plan d’ajustement structurel (PAS) appelé dans le nouveau jargon du FMI "Un Programme des Reformes Structurelles" (PRS). Y a-t-il des différences
significatives entre le PAS et PRS ? Oui, ce que allons voir !
L'expérience d'ajustement structurel en Tunisie à partir de 1985 a permis de
rétablir «l’équilibre soutenable» de la balance des paiements tout en
transformant une économie réglementée en une économie plutôt orientée vers le
marché et l'exportation. Ce plan se traduit grosso modo par (1) une dévaluation
importante dinars par rapport aux principales devises, (2) la vente des
entreprises publiques à caractère industriel ou commercial au profit du secteur
privé national en général pour réduire le déficit du budget de l’Etat et (3)
un certain dégraissage dans la fonction publique par le blocage des
recrutements. Le Programme des Reformes
Structurelles serait du même ordre des reformes que le PAS mais avec un
contexte bien différent : (1) la dévaluation du dinar est une évidence
pour freiner le déficit de la balance des paiements. Les proportions restent à
fixer pour encourager les IDE non exportateurs à réinvestir leurs bénéfices
dans l’économie tunisienne au lieu de les exporter à l’étranger. Pour cela il
faudra opérer le plus tôt possible une dévaluation d’au moins 50 %. Cette
dévaluation serait-elle supportable pour les entreprises exportatrices ?
une étude sérieuse doit être commandée pour arrêter le niveau de la dévaluation
à opérer, faute de quoi, nous risquons d’introduire des distorsions non
maitrisables ! (2) L’Etat serait-il amené à vendre les bijoux de famille
comme la STEG, la SONEDE, la partie de l’Etat de « Tunisie Télécom »,
La Poste, Tunisair, etc. S’il ose le faire, la contestation populaire pourrait
provoquer une paralysie du pays (grèves, désobéissance civile, etc.). Un
dossier difficile à gérer d’autant plus que la vente des entreprises publiques
aggraverait le déficit de la balance des paiements, (3) les grandes reformes de
la fonction publique, du système de sécurité sociale et la caisse générale de
compensation ne sont possibles que si l’UGTT est impliquée d’une manière ou
d’une autre dans l’exécutif du pays. Cette éventualité est possible, si Nidaa
Tounès, parti rassemblant les bourguibistes, la gauche ugttistes et les
démocrates indépendants, gagne les prochaines élections.
Pour bien comprendre les réserves du FMI concernant l’avenir
de notre pays, il faut examiner ses rapports avec des pays similaires au nôtre.
En effet, le FMI vient d’accorder au
Maroc 6.2 milliards de dollars dans le cadre d'une nouvelle ligne de crédit de
précaution et de liquidité. Ce dispositif de régulation est ouvert aux pays
ayant des agrégats macro-économiques stables et ne souffrant d’aucun déséquilibre
majeur. La Tunisie, il y a quatre ans, pouvait postuler à ce dispositif mais les
évènements du 14 janvier ont mis fin à cette possibilité. Notre pays ne pourra revendiquer
un tel avantage qu’une fois son PRS mis en place avec succès. Là, il
faudra 7 à 10 ans !
Mustapha STAMBOULI