Le projet de loi de finances pour 2026, tel que révélé par certains médias et analysé par plusieurs experts, se veut un "budget de relance et de reconstruction nationale" axé sur la "justice sociale". Cependant, il suscite un débat intense, en raison d'hypothèses jugées optimistes et de préoccupations concernant le financement de l'État.
Introduction
Le budget de l'État pour l'année
2026 repose sur un ensemble d'indicateurs et d'hypothèses clés qui définissent
les ambitions économiques du gouvernement. Ces estimations, basées sur les
résultats de l'année précédente, la croissance attendue et des variables
macroéconomiques, servent de fondement aux prévisions de recettes et de
dépenses. L'examen de ces hypothèses et des chiffres qui en découlent est
essentiel pour comprendre les orientations budgétaires et évaluer leur
réalisme.
I. Les hypothèses fondamentales du budget
2026
Le budget s'articule autour de cinq
hypothèses majeures :
- Les résultats de 2025 : Les estimations prennent en compte
l'exécution du budget de l'État jusqu'à la fin août 2025.
- La croissance économique : Une reprise progressive de
l'économie est anticipée, avec un taux de croissance ambitieux de 3,3 %
pour 2026, notamment dans les secteurs de l'agriculture, des services et
du tourisme.
- Les importations de biens : Le budget table sur une amélioration
du rythme de croissance des importations de biens de 4 % par rapport à
2025.
- Le prix du pétrole : Le budget est basé sur un prix moyen
du baril de pétrole Brent de 63,3 dollars.
- Le taux de change : L'une des hypothèses cruciales est
la stabilisation du taux de change du dinar tunisien face aux principales
devises.
II. Les chiffres clés du budget
Sur la base de ces hypothèses, les
principaux chiffres annoncés sont les suivants :
- Ressources de l'État : Elles sont estimées à environ 79,624
milliards de dinars, soit une augmentation de 3,9 % par rapport aux 76,632
milliards de dinars prévus pour 2025.
- Recettes budgétaires : Elles s'élèveraient à environ 52,560
milliards de dinars, marquant une hausse de 7,1 % par rapport aux 49,090
milliards de dinars de 2025. Ces recettes représenteraient 66 % du total
des ressources de l'État.
Le budget prévoit également un
déficit de 11 milliards de dinars. Pour le combler, l'État a recours à des
emprunts massifs et prévoit d'obtenir une autorisation pour la Banque Centrale
de prêter 11 milliards de dinars à l'État, un mécanisme de financement qui
suscite le débat.
III. Les critiques et l'valuation du
budget 2026
La présentation de ce budget a
déclenché un vif débat parmi les experts économiques.
- Critique des hypothèses de croissance : L'hypothèse d'une croissance de 3,3
% est considérée comme trop optimiste. Des institutions internationales
comme la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International (FMI)
prévoient une croissance plus modérée pour la Tunisie, respectivement de
2,4 % en moyenne sur 2026-2027 et 2,1 % pour 2026. L'écart entre les prévisions
gouvernementales et celles des institutions internationales suscite des
doutes quant à la réalisation des objectifs budgétaires.
- Critique du financement du déficit : Le recours à l'endettement massif et
au financement direct par la Banque Centrale est au cœur des
préoccupations. Ce mécanisme de financement par la planche à billets est
perçu comme risqué et pourrait avoir des conséquences inflationnistes
importantes, selon plusieurs analystes.
- Absence de vision claire : Certains experts et observateurs
avisés estiment que le projet de loi de finances manque d'une vision
stratégique globale pour l'économie tunisienne. Ils soulignent l'absence
d'une "boussole" claire pour orienter les réformes structurelles
nécessaires.
IV. Les points positifs et les orientations
sociales
Malgré ces critiques, le budget met
l'accent sur plusieurs aspects sociaux et économiques :
- Justice sociale : Le gouvernement présente le budget
comme un moyen d'atteindre la "Justice sociale et le développement
régional équilibré".
- Subventions et postes : Le budget prévoit de poursuivre la
politique de subventions ciblées pour les produits de base, les carburants
et les transports. Il promet la création de plus de 51 000 postes,
incluant la régularisation de certains agents, ce qui pourrait atténuer
les tensions sociales.
Note :L'analyse du mécanisme de financement du budget 2026, notamment le recours à l'endettement massif et à la Banque Centrale, mérite un traitement plus approfondi. Dans un prochain article, nous reviendrons sur les implications économiques de ces choix, notamment en termes d'inflation, de stabilité monétaire et de risques à long terme pour l'économie tunisienne. La gestion de ce déficit et les stratégies alternatives de financement seront au cœur de cette réflexion.
Conclusion
Le budget de l'État tunisien pour
2026 est un document qui reflète les ambitions de relance et de stabilisation
de l'économie, tout en mettant l'accent sur la justice sociale. Cependant, il
repose sur des hypothèses qui sont perçues par certains experts comme
optimistes. La critique principale porte sur le financement de l'État, avec un
recours à l'endettement et aux financements non conventionnels qui pourraient
être risqués pour l'économie. La crédibilité de ce budget dépendra de la
capacité du gouvernement à réaliser ses prévisions de croissance et à gérer
efficacement son déficit, tout en affrontant les défis économiques structurels
persistants.
Mustapha STAMBOULI, 27/10/2025
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