13 janvier 2014

Trois ans au compte des pertes sans profit !

Nul ne doute que le « printemps arabe » a déstabilisé la région au lieu d’engendrer une meilleure gouvernance,  prospérité et démocratie. Le terrorisme financé par certains pays golfiques, sous-traitants d’Israël, ouvre une voie royale à l’installation de l’Occident dans la région et favorise le retour des facho-dictateurs. Ainsi, la boucle serait bouclée.

L’échec de la transition islamiste – assassinats politiques, effondrement de l’économie et de la monnaie nationale,  fragilisation de la sécurité, érosion de l’autorité de l’Etat, non respect des engagements pris, n’est plus à démontrer. Ces faits ont plombé le présent et risquent d’handicaper le futur de la Tunisie. Le vrai blocage politique vécu par la Tunisie résulte essentiellement de l’incapacité de la classe politique à s’entendre sur un projet de société. Les déchirements à l’intérieur de la constituante concernant la formulation du projet de la loi fondamentale le prouve.

Tout indique que la Tunisie se prépare à faire table-rase de la transition de la honte et entamer un nouveau processus démocratique. En effet,  la Constitution promise ne sera probablement pas adoptée par la Constituante  faute de majorité qualifiée définie par la petite constitution : ni les islamistes ni les progressistes ne voteront ce torchon truffé de contradictions et de pièges.

Comment le camp républicain votera-t-il une constitution avec son article 38 ? Ce dernier annule les quelques avancées de ce projet. Il installe de facto un Etat fasciste dont la mission est « d’implanter à travers l’école exclusivement l’identité islamique» ; cela veut dire oblitérer notre passé si riche en diverses cultures et peuplements variés. Même Yadh Ben Achour  qualifia de «jour noir», le jour où les constituants islamistes votèrent massivement pour cet article fasciste, rétrograde. Il ajouta en parlant des islamistes : «ces gens qui ont été pendant très longtemps absents du pays».

Par ailleurs, comment les intégristes de la constituante oseront-ils voter pour cette constitution qui autorise des tunisiens musulmans à quitter l’Islam pour une autre religion ? Comment pourront-ils accepter les dispositions permettant l’apostasie et la liberté de culte ? Notons les contradictions avec la volonté d’imposer une identité islamique …

Nous pensons que le gourou a torpillé le processus constitutionnel en obligeant ses béni-oui-oui à voter pour les articles contradictoires. Il a compris qu’il n’est plus le maitre de la situation. Il passe l’éponge en acceptant sciemment de soumettre la Constitution à l’avis du peuple par voie référendaire.

La fin d’un cauchemar prend forme : il est certain que le peuple entier votera contre ce projet inacceptable : les républicains bourguibistes ne peuvent pas accepter cet article 38 dans leur loi fondamentale. De même, les islamistes ne voteront pas oui pour une Constitution protégeant les athées … Le non est garanti pour ce projet ridicule de Constitution.

Le refus massif et populaire de ce torchon suppose la dissolution automatique de la Constituante et la remise des pouvoirs législatifs à l’exécutif- Chef de gouvernement et Président. Dans ce scénario annoncé, le tartour serait déchu de ses fonctions pour de multiples raisons – son livre noir entre autres. Un BCE à la présidence n’est pas exclu – l’Occident serait là pour appuyer cette candidature et le himar watani ne peut que l’accepter - cf MEJO !

La Tunisie, laboratoire de l’Occident, a choisi une méthode « soft » pour dégager les incompétents islamistes : une méthodologie pouvant être proposée à d’autres pays !
La suite du processus démocratique de la Tunisie se simplifie énormément :

(i)               mise en place d’un comité d’une vingtaine de personnalités nationales pour proposer une Constituante en faisant la synthèse de la Constitution de 1959 et du projet rejeté en incluant aussi des dispositions avant-gardistes comme la décentralisation intégrale et progressive, la suppression de la peine de mort, la protection de nos ressources minières et énergétiques, etc… Il est clair que ce projet doit être soumis à un référendum populaire.

(ii)              (ii) mise en place d’une administration électorale dotée de moyens humains et financiers, premier signe de bonne foi vers la normalisation de la vie démocratique du pays. Un comité d’experts indépendants, à désigner, devra établir un nouveau code électoral réellement juste et transparent tenant compte des conditions politiques et  objectives du pays afin d’éviter le ratage des élections du 23 octobre dernier.

(iii)            stabilisation économique et financière de notre pays : ceci exige en premier lieu la suppression de la loi de finances 2014 votée à la hâte par les incompétents et les irresponsables du Palais du Bardo et la conception d’un plan-programme sur une durée de deux ans afin de  sortir le pays de son marasme économique. Les nouvelles autorités du pays peuvent faire appel aux tunisiens et tunisiennes pour le financement des projets de développement des zones méritant une intervention d’urgence. L’Etat pourrait émettre  des obligations sur cinq ans à cette fin sans faire appel au FMI et à la Banque mondiale.

(iv)            lancement d’une série de conférences nationales thématiques  sur les principales problématiques de la Tunisie : éducation, préservation des ressources minières et énergétiques, décentralisation, etc. Les consensus dégagés de ces conférences seront imposés aux prochains gouvernements afin d’éviter errements et perte de temps.

(v)             installation d’une Centrale Républicaine de Renseignent (CRR) totalement indépendante. Un FBI tunisien est un besoin urgent  car notre pays est vraiment menacé par le terrorisme international jihadiste surtout que notre voisin du Sud est en train de se « somaliser » chaque jour un peu plus.

Le futur exécutif n’a pas le  droit à l’erreur car la situation socioéconomique du pays est explosive,  tous les chiffres économico-financiers étant au rouge : (i) le déficit de la balance commerciale pourrait atteindre 8 Milliards de dinars en 2013, (ii) le dinar a perdu plus de 9 % en 2013, cette érosion pourrait atteindre 20% si on laisse glisser le dinar par rapport aux principales devises, (iii) la bourse a perdu plus de 7 % en 2013 et 14% depuis le 14 janvier 2011  et rien n’indique que cette descente aux enfers  s’arrêtera.

La maison Tunisie brûle et nos politiciens doivent arrêter leurs palabres interminables et leurs combines partisanes sinon, ils seront coupables de crime de haute trahison vis-à-vis du peuple, en particulier des plus démunis qui espéraient tant du changement.

A côté d’un passif énorme en matière de pouvoir d’achat, d’emploi et de perte de sécurité, les tunisiens et tunisiennes peuvent se glorifier d’avoir dégagé pour toujours ZABA et sa mafia – même si l’étranger y était pour beaucoup. Ils  ont mis aussi à l’écart les islamistes pour leur incompétence, leur démagogie et leur accrochage au wagon qataro-salafiste. Ils  ont arraché une réelle liberté d’expression sans égale dans la région arabe. La période post 14 janvier 2011 a permis l’émergence d’une société civile forte, battante, intelligente, revendicatrice et variée. Les partis politiques sous peine de disparaitre ou se décrédibiliser devraient emboiter le pas à la société civile.

Mustapha STAMBOULI