Pourquoi cet acharnement contre les médias publics et ces menaces
de privatisation proférées par le gouvernement provisoire et les lieutenants du parti islamiste au
pouvoir ? Pourquoi le président provisoire ne réagit-il pas et ne
condamne-t-il pas ces agissements irresponsables cherchant à liquider les
symboles de l’Etat et de la République. Après les attaques contre l’hymne
national et le drapeau, les voilà en
train de préparer un stratagème pour réduire au silence la voie du peuple
tunisien. La télévision est-elle victime de son succès d’audimat (plus de 38,1 %)
alors qu’Al Jazeera n’a ramassé que des miettes (2,7% d’audience). Est-ce pour
remercier Al Watania pour son succès qu’on cherche à la liquider ? Le
dégagement d’Al Jazeera à plusieurs reprises lors de grands évènements explique-t-il
cette intention ? Cette stratégie de liquidation des symboles nationaux
est une constante du projet des islamistes aidés par leurs jihadistes, bras de
déstabilisation des institutions républicaines.
Il est vrai que la maison de la Radio et de la Télévision
(RTT) a servi de courroie de transmission pour le matraquage et la diffamation des
opposants au régime de Ben Ali. Les fonctionnaires zélés devront répondre
devant une juridiction spéciale en raison de leurs torts causés à l’intérêt
national et à la crédibilité de l’institution. Notre «Joseph Goebbels» national
devra comparaître, en premier, devant
cette juridiction transitionnelle pour expliquer comment la machine de
propagande et de diffamation en parvint
à ce degré d’absurdité et de désinformation. Cette personne doit présenter des
excuses au peuple tunisien pour le mal causé.
Comment peut-on admettre d’un responsable d’un parti, fut-il
au pouvoir (provisoirement), qu’il se permette d’annoncer la privatisation des
médias publics à des journaux étrangers qataris et omanais ?
Impardonnable ! Cette annonce constitue une atteinte à la souveraineté de
l’Etat tunisien. Cette personne doit cesser de jouer le rôle du président des
présidents et si elle s’estime compétente pour diriger le pays, à elle de prendre le
poste qu’elle souhaite ! Le président provisoire déjà fatigué par ses
voyages multiples à l’étranger (plus de
kms parcourus que Ben Ali en 23 ans) a-t-il attrapé le syndrome aigu de la
sarkozite ? Le chef du gouvernement
ne dort plus, d’après Marzouki, depuis
que le wikileaks tunisien a piraté sa boite d’emails… Alors, Gannouchi, le
peuple vous attend impatiemment pour apprécier vos compétences et votre projet
de privatisation des symboles de la République ! Mais poursuivre à
déstabiliser nos institutions républicaines par des déclarations inopportunes n’est
qu’outrage inadmissible voire agression
gratuite.
L'Instance Nationale pour la Réforme de
l'Information et de la Communication (INRIC) a condamné samedi 21 Avril les
déclarations de Gannouchi aux médias étrangers et estime qu'il serait plus
judicieux de libérer les deux décrets-lois n°115 et 116 relatifs à la réforme
du secteur de l'information et de mettre en place les instances indépendantes
chargées de son organisation ainsi que la réflexion sur les meilleurs moyens de
promouvoir l'information publique, locomotive sans laquelle il serait inutile
de réfléchir à une quelconque réforme.
Les médias publics, propriété collective, vecteurs d’émancipation
et de diversité, appartiennent à tous les tunisiens et tunisiennes sans
distinction partisane. Il est de notre devoir et de notre intérêt de réunir nos
efforts et énergies pour apporter notre soutien à tous les employés de ces
médias et à tous les producteurs patriotes qui participent à la création, l’innovation et l’information
objective.
L’idée de privatisation des médias publics vise en premier
lieu à faire pression sur les fonctionnaires et producteurs de ces médias afin
qu’ils acceptent les diktats du gouvernement et des «leaders» du parti
islamiste. En seconde étape, le pouvoir vise à banaliser le concept de privatisation des symboles de
la République pour, à moyen et long termes, réaliser ses objectifs ultimes :
la destruction de l’Etat national et l’imposition de la notion d’El Oumma et de
la Khilafa. Ainsi, «l’Emirat tunisien» n’aurait plus besoin de médias publics
tunisiens, Al Jazeera pourrait suffire. Dans cette même logique et perspective,
la Banque Centrale de Tunisie et le dinar tunisien risquent d’être les
prochaines victimes du complot qatari avec la complicité de nos patriotes
islamistes.
Ne nous étonnons pas si dans les prochaines semaines, ce
même médiatique Gannouchi depuis Doha nous annonce qu’il a décidé de privatiser
Tunis Air au profit de Qatar Airways et ceci pour le bien des tunisiens et
tunisiennes et par anticipation à l’Open Sky.
Le peuple tunisien est fatigué par ce petit jeu malsain
sapant le moral des patriotes, sujet d’inquiétude pour toutes les bonnes
volontés. Cette politique de diversion occupe nos intellectuels. Le
gouvernement actuel tente de nous noyer sous un amas de faux problèmes
reflétant sa vision fondée sur une idéologie d’un Islam international et de ce
fait occulte les vraies questions : la Constituante, la récupération des
biens mal acquis par les sept familles de Ben Ali, l’économie à la dérive, le
chômage grimpant, la pauvreté généralisée, la faillite prévisible des caisses
de retraite, etc…
Il revient justement aux
médias publics la responsabilité d’informer et de sensibiliser en toute
transparence et en toute objectivité le peuple tunisien sur toutes les facettes
et enjeux nationaux et internationaux afin de développer sa conscience
citoyenne et républicaine, ce que les médias privés ne feront jamais. Bien au
contraire, ces médias n’obéissent qu’à une seule logique : servir les multinationales
et le pouvoir pour transformer les citoyens en consommateurs aliénés, perméables
à l’idéologie ultralibérale dominante. Est-ce un hasard si les islamistes se
réclament de cette idéologie ?!...
Mustapha STAMBOULI