11 novembre 2012

Projet de loi de finances pour 2013 : telle une Constitution sans préambule !


« Les finances publiques doivent être saines, le budget doit être équilibré, la dette publique doit être réduite, l'arrogance de l'administration doit être combattue et contrôlée, … La population doit encore apprendre à travailler au lieu de vivre de l'aide publique. » CICERON, 55 avant JC.

Le projet de loi de finances pour 2013, premier vrai budget de la Troïka au pouvoir, marque-t-il un tournant dans la politique fiscale et budgétaire de notre pays ? Ou serait-il  un plagia des anciens budgets de ZABA sans comprendre ni leur philosophie ni leurs objectifs ?

Ce budget remettra-t-il  la justice au cœur du système fiscal ou continuera-t-il à saigner  les personnes physiques et les entreprises afin d’équilibrer un budget orienté vers des dépenses non-nécessaires comme celles des budgets de la présidence, de l’Assemblée constituante ou du gouvernement pléthorique composé de 80 ministres ?

Cette Loi des finances aidera-t-elle les collectivités locales qui se débattent dans une crise financière sans précédent ? Le risque de banqueroute des Municipalités est à l’ordre du jour si l’Etat ne vient au secours de ces établissements publics ?

Ce budget compte-t-il poursuivre la politique suicidaire de recrutement dans la fonction publique ou cherche-t-elle une stabilisation progressive des effectifs et de la masse salariale de l’Etat ?

A l’examen du projet de budget 2013, nous constatons que celui-ci va accentuer massivement le déficit et s’écarter de plus en plus d’un équilibre des comptes publics.

Comment peut-on faire un budget sans une référence de planification et de programmation multi-annuelle ? Pourquoi le gouvernement n’a-t-il pas établi un document de cadrage sur 3 ans pour exposer les grandes lignes de ses choix économiques et sociaux afin de permettre à chacun de comprendre les options fondamentales. Comment les investisseurs peuvent-ils lire ce projet sans une vision sur le budget économique pour 2013

Comment établir un budget sans évaluer les résultats de l’exercice précédent ? Que d’incohérences et de travail bâclé !!
Plus du tiers du Budget de l’Etat sera réservé au remboursement de la dette et au renflouement la caisse de compensation. Alors que reste-il pour l’investissement public, porteur de croissance ! Le gouvernement compte-t-il trouver les devises pour rembourser sa dette extérieure, laquelle  va atteindre un niveau exceptionnel cette année de l’ordre de 4,5 milliards de dinars ?

Ce projet de budget n’est qu’un arsenal de répression fiscale et un bulldozer de destruction de la croissance surtout après les mesures restrictives décrétées et décidées par la banque Centrale en matière d’octroi de crédits de consommation en octobre dernier. Autrement dit, ceci équivaut à des pertes d’emplois existants et une création ZERO de poste de travail.

Si le gouvernement persiste dans le déficit budgétaire au-delà du plafond raisonnable – ligne rouge-  de 3-3,5 %,  ceci causera fatalement un effondrement  du système et poussera le gouvernement à s’endetter toujours davantage, mettant en péril la souveraineté de la Nation. Cette ligne rouge de déficit budgétaire à 3% est le résultat d’une réflexion profonde des spécialistes pour protéger les équilibres fondamentaux afin d’éviter toute dérive en matière de la balance des paiements. Le gouvernement compte-t-il vendre aux investisseurs étrangers toutes nos entreprises et toutes nos richesses pour équilibrer momentanément le déséquilibre de cette balance ? Chadly Ayari, gouverneur de la BCT, sait mieux que quiconque que la Tunisie se trouve actuellement dans une situation critique, voire dramatique sur le plan de la stabilité des fondamentaux risquant de mettre en péril le dinar tunisien et sa valeur réelle. Déjà la valeur internationale du dinar est de loin au delà  de sa valeur imposée par la BCT.

La dette extérieure de la Tunisie ne fait que grimper. Le  franchissent des lignes rouges nous inquiète car : (i)  son volume pourrait atteindre,  fin 2012,  5 Milliards de DT, (ii) ses coûts deviennent de plus en plus chers eu égard aux notes catastrophiques des agences internationales de notation et la rétractation américaine dans le cautionnement de nos emprunts et (iii) ses utilisations peu rationnelles et peu utiles pour la création d’emplois et de richesses pour la Nation. Les IDE non exportateurs sont responsables en grande partie de cette dérive des balances des paiements. L’exercice 2013 accentuera ces distorsions et exposera la Tunisie à une grave crise.

Pourquoi le gouvernement n’élabore-t-il pas  un budget de combat afin d’équilibrer les comptes et en finir avec les déficits chroniques destructifs du tout le système économique. Le déficit de l’Etat c’est des fonds en moins pour l’investissement des entreprises et des ménages, seul créateur d’emplois. Les tunisiens pourraient accepter de faire l’effort à condition d’éviter  aux générations futures une lourde dette qui constituerait un véritable impôt à la naissance dont personne ne voudra.

Seul un budget équilibré sans endettement pourrait convaincre les pays du G8 à débloquer les fonds promis de 10 à 15 Milliards de dollars. Sans assainissement des comptes publics, sécurité sociale et caisses de retraites comprises, les investisseurs nationaux et étrangers se maintiendront en position d’attente et d’hésitation.

Je terminerai par cette citation de Henry Louis Mencken, le Nietzsche américain : « L’ennemi numéro un de tout Etat est l’homme qui est capable de penser par lui-même sans considération pour les superstitions et les sophismes de la pensée unique. Presque inévitablement il parviendra alors à la conclusion que l’Etat  sous lequel il vit est malhonnête, insensé et insupportable. Ainsi, si cet homme est idéaliste il voudra le changer. S’il ne l’est pas, il témoignera suffisamment de sa découverte pour générer la révolte des idéalistes contre l’Etat.

Mustapha STAMBOULI