20 juillet 2025

La tentative de création d’une banque postale en Tunisie : un projet vide de fond et de faisabilité

 

Face à l’annonce du projet de création d’une banque postale en Tunisie, nombreux sont ceux qui s’interrogent sur sa crédibilité et sa viabilité. Derrière la façade d’une solution sociale et moderne, ce vaste chantier soulève de sérieuses questions techniques, économiques et stratégiques. Cet article analyse pourquoi ce projet apparaît aujourd’hui comme une initiative sans fondement solide, susceptible d’engendrer des coûts exorbitants et de mettre en danger la stabilité financière, tout en soulignant la responsabilité du Parlement dans la prise de décision en la matière.

 Une initiative aux allures populistes et sans fondements économiques solides

Depuis l’annonce du projet de transformation de la Poste tunisienne en une banque postale, de nombreux acteurs économiques, politiques et experts en finances ont exprimé leur scepticisme. Si l’objectif affiché de renforcer l’inclusion financière et de moderniser le paysage bancaire national est louable en apparence, l’analyse approfondie montre que ce projet repose sur des bases fragiles, voire inexistantes.

Un manque flagrant d’évaluation de la rentabilité

Première critique majeure : aucune étude sérieuse ne vient étayer la viabilité économique de cette nouvelle banque. La rentabilité d’un établissement bancaire repose sur un modèle d’affaires solide, avec une gestion efficace des coûts et la capacité à générer des marges suffisantes. Or, la création d’une telle institution requiert une modélisation précise, comprenant l’estimation des revenus, la maîtrise des investissements et la projection de la rentabilité à moyen et long terme. En l’absence de telles études, toute assertion sur la viabilité de cette initiative demeure spéculative et peu crédible.

Des coûts d’investissement exorbitants et non justifiés

La modernisation des infrastructures, la formation du personnel, le déploiement des solutions technologiques et la sécurisation des transactions représentent des investissements considérables. La théorie économique et l’expérience internationale montrent que tout projet de cette envergure doit faire l’objet d’études de faisabilité détaillées, y compris des appels d’offres publics, afin de garantir la meilleure utilisation des ressources et la maîtrise des coûts. Sans ces analyses, il est impossible d’estimer précisément le montant nécessaire ou d’assurer la rentabilité future, ce qui expose à des risques financiers majeurs.

Un projet à l’absence d’arguments techniques ou stratégiques solides

Au-delà des aspects financiers, ce projet apparaît manquer totalement d’un argumentaire technique ou stratégique cohérent. La diversification de l’offre bancaire ou l’inclusion sociale ne peuvent justifier, à eux seuls, la création d’un nouvel établissement, surtout dans un marché où plusieurs acteurs sont déjà présents et compétitifs. La littérature économique recommande une différenciation claire, une stratégie de niche ou d’innovation pour qu’un nouveau concurrent puisse réussir. Or, rien dans ce projet ne semble répondre à ces exigences fondamentales.

Risques de gestion et de stabilité

L’introduction d’un acteur bancaire supplémentaire sans une gestion experte et sans respect strict des normes prudentielles peut mettre en danger la stabilité financière, comme cela a été observé dans plusieurs pays où des banques mal gérées ont entraîné des crises majeures. La gestion d’une banque requiert une expertise spécifique, que le personnel de la Poste, initialement spécialisé dans les services postaux, n’a pas nécessairement. La présence de risques significatifs doit faire l’objet d’une évaluation rigoureuse et transparente.

Une démarche populiste, conçue pour des bénéfices électoraux

Face à ces enjeux, il est évident que ce projet pourrait facilement devenir un outil de communication politique, destiné à élargir la base électorale ou à donner une image de progrès social, sans véritable fondement économique. La population mérite une gouvernance responsable et une analyse sérieuse, plutôt qu’un discours populiste basé sur des promesses vides de fond.

Une démarche scientifiquement non fondée, basée sur des standards internationaux

Les bonnes pratiques en gestion financière et en politique économique insistent sur la nécessité d’études de faisabilité indépendantes, détaillées et transparentes avant toute mise en œuvre d’un tel projet. La littérature et les expériences internationales montrent que toute nouvelle banque doit disposer d’un business plan solide, d’une étude coûts-avantages, et d’une estimation précise de ses coûts d’investissement et de ses perspectives de rentabilité. Faute de cela, le projet apparaît comme une initiative dénuée de fondement technique et économique.

Conclusion : un projet à remettre en question

Conclusion : une responsabilité inscrite dans la décision du Parlement

Au vu des enjeux techniques, économiques et financiers présentés, il appartient désormais au Parlement tunisien de prendre ses responsabilités. Avant de s’engager dans la mise en œuvre d’un projet aussi coûteux et potentiellement risqué, le Parlement doit exiger une étude de faisabilité indépendante, détaillée et transparente. À défaut, il risque d’engager des ressources publiques dans une initiative sans fondement solide, susceptible d’engendrer des coûts importants sans bénéfices tangibles pour la population. La responsabilité de garantir la stabilité financière et l’utilisation efficace des deniers publics incombe à ses membres. Il est donc impératif que le Parlement refuse de valider cette démarche tant qu’une évaluation sérieuse n’a pas été réalisée, afin d’éviter une décision irréversible basée sur des promesses vides et des hypothèses non vérifiées.

Mustapha STABOULI

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