Pourquoi Nidaa Tounès se trouve-t-il dans une
situation profondément délicate voire catastrophique ? Ce mouvement
survivra-t-il à son congrès de tous les dangers ? L’affrontement entre personnes à Nidaa Tounès cache-t-il un conflit régional entre le Nord d’une part, le Centre et le Sud de l’autre ? L’implosion de Nidaa
Tounès est-elle programmée par les « Amis de la Tunisie » ? Qui
seront les bénéficiaires du chaos Nidaaiste ? La banqueroute inévitable de l’économie
tunisienne provoquera-elle une reconfiguration du système politique
tunisien ? En choisissant une alliance avec les islamistes, BCE a-t-il
cherché à créer les conditions objectives de l’éclatement de Nidaa Tounès ? La crise libyenne a-t-elle imposé l’alliance contre-nature entre les deux Vieux ? Le projet de loi sur a «réconciliation»
économique et financière prouve-t-il que
Nidaa Tounès est devenu l’otage des lobbies affairistes ? L’ancien Maître
de Nidaa Tounès est-il encore capable de maitriser la boite de pandore qu’il
vient d’ouvrir ? Le « silencieux» Taieb Baccouche, a-t-il encore un mot à
dire dans la métamorphose de Nidaa Tounès ? Les militants de base de ce mouvement sont-ils encore en mesure de sauver
le parti et contrer le complot ? Ou optent-ils pour créer un nouveau
mouvement carrément bourguibien en laissant tomber les extrêmes insolubles ?
Le Mouvement Nidaa Tounès s’est imposé sur la scène
politique comme étant un parti de masse pouvant rivaliser avec celui des
islamistes. Ce parti a permis de
repousser - provisoirement- le projet rétrograde
des islamistes qui cherchent à remettre en cause les avancées sociétales et
l’indépendance de notre pays.
Nul ne
conteste que Nidaa Tounès ait sauvé le pays d’une « dictature islamiste démocratique».
Malheureusement, ce mouvement n’est plus
en mesure d’assurer sa mission de
régulateur politique et ceci pour des raisons multiples (hésitation
agaçante sur la vision et sur les
réformes à proposer au peuple, alliance incompréhensible avec son principal adversaire, le départ de BCE à Carthage ayant compliqué
l’équation à l’intérieur du parti, absence de dirigeants charismatiques capables
de réhabiliter le parti …) .
Pourquoi se
préoccuper de l’état de santé de Nidaa
Tounès ? Parce que, pour le dire simplement, la viabilité/pérennité de
ce mouvement n’est plus garantie à court
et moyen termes, d’où le risque de domination sans partage des islamistes de
l’espace politique dans un proche avenir.
N’oublions
pas que Nidaa Tounès a été construit dans l’urgence pour faire face à
l’hégémonie des mouvements peu républicains qui cherchaient à remettre en cause
les acquis sociétaux engagés depuis l’indépendance de notre pays et l’autonomie
de la décision tunisienne.
Notre enthousiasme a aidé à mettre en place, en un temps record, ce mouvement républicain. L’establishment de Nidaa Tounès n’avait pas jugé utile de créer un parti selon les règles de l’art. Tout observateur indépendant ne peut que relever la frilosité/incompétence et surtout l’égoïsme des dirigeants de ce mouvement qui ont toujours cherché, par tous les moyens, à mettre la main sur toutes les structures du parti au point qu’on se croirait chez le RCD défunt où tout est décidé par le chef et la nomenclature du parti. Pourtant, même, le RCD avait laissé une marge aux structures locales et régionales pour élire démocratiquement leurs représentants. Rien de cela à Nidaa Tounès … Il n'agit que par des parachutages et une improvisation sans équivalent
Par
ailleurs, Nidaa Tounès a trahi, lors
des élections législatives, ses
partenaires politiques qui avaient pris des engagements avec leurs bases dans le
sens d’une union stratégique avec Nidaa Tounès (électorale, vision, projet sociétale, programmes …).
Le départ de
BCE à Carthage et le «parachutage» de la nouvelle direction du parti ont crée
le chaos à l’intérieur du mouvement. Le congrès du parti programmé pour 2016 ne
pourrait, s’il a lieu, qu’enregistrer la mort clinique de ce dernier, car
personne n’a légitimité ou charisme pour réussir ce congrès de tous les
dangers.
L’alliance des
islamistes avec Nidaa Tounès imposée par
les «Amis de la Tunisie» pour gérer le
pays n’aide pas les «Nidaaistes» pour établir une plateforme unitaire et une stratégie
de pouvoir. L’action bégayante de l’exécutif est une illustration du non-sens
de cette stratégie d’alliance. La situation économico-sociale est
alarmante. En effet, la récession
aidant, l’Etat n’a plus les moyens
financiers pour clôturer la gestion 2015 ; il faudrait trouver plus de 7
Milliards de dinars pour combler
un gap budgétaire. Par ailleurs, le climat social est tendu au point
qu’on croirait revivre la crise de
l’UGTT-Gouvernement Nouira en 1978. L’absence d’actes forts pour réformer
l’Etat tunisien et surtout son économie ne peut que précipiter la banqueroute.
La Tunisie
va mal et les perspectives se rétrécissent voire s’éclipsent au profit de
l’anarchie et de la dictature. La Tunisie a besoin d’une vision et d’une
révision totale des choix socio-économiques hérités de la mafia Ben Ali. Elle
doit revenir aux fondamentaux bourguibiens privilégiant les services publics et
une réelle distribution des richesses pour plus de justice sociale et
d’efficacité économique et repenser la vente de nos fleurons industriels et
économiques cédés au capital étranger et/ou à des sociétés-écrans. Comment
comprendre et accepter qu’aucune des lois votées sous Ben Ali par un Parlement
acquis n’ait été remise en cause, surtout celles octroyant des avantages
illimités à la «cour» et aux courtisans ?
Nidaa Tounès
se trouve devant une impasse infranchissable (action gouvernementale décevante,
gabegie à l’intérieur du parti …). Devant
cette situation chaotique, selon nous, deux alternatives s’offrent aux militants de Nidaa
Tounès afin de sauver le mouvement de la dérive :
- Compte tenu de la présence à l’intérieur du parti d’une mosaïque politique non soluble, il serait opportun de scinder à l’amiable le mouvement Nidaa Tounès en deux partis : un parti libéralo-centriste proche des partis conservateurs et un mouvement progressiste bourguibien, proche des partis de gauche et de la société civile progressiste. Ces deux « formations-amies » peuvent partager une plateforme consensuelle républicaine pouvant les aider à réaliser des ententes électorales et pourquoi pas une gestion commune du pays. Cette réorganisation éviterait l’éparpillement des militants-sympathisants et de l’électorat du parti vers d’autres formations politiques inefficaces. Rien n’empêcherait une fusion à moyen terme si les conditions objectives se réunissaient. Cette configuration pourrait écarter l’aile syndicale du parti à moins que Taieb Baccouche ait une solution miracle pour sauver l‘unité du parti et demeurer, lui et ses camarades syndicalistes minoritaires, dans cette famille progressiste ? Rien n’indique que cet homme ait les moyens pour contrer la "fatalité", car ses fonctions actuelles de Ministre des Affaires Etrangères le privent de l’action militante et du travail de terrain. BCE a-t-il piégé Taieb Baccouche en lui « imposant » le portefeuille des affaires étrangères ? Tout laisse à croire … Cet ancien syndicaliste suivra-t-il les pas de son collègue Lazhar AKRIMI et quittera-t-il le navire qui coule pour s’occuper du parti et préparer le congrès décisif du mouvement. Les chances de récupérer le terrain perdu restent minimes. Toutefois, rien n’est impossible, si cet homme silencieux se métamorphose en bourguibien de raison …
- Reporter le congrès du parti pour plus tard -après les élections municiplaes-, le temps nécessaire pour organiser et installer les structures locales et régionales selon des procédures forcément démocratiques. Cette option pourrait permettre au mouvement de découvrir d’autres compétences et des militants pouvant aider le parti à résoudre sa quadrature du cercle. Si le blocage persiste, rien n’empêche que les congressistes désignés démocratiquement optent pour la mise en place de la première alternative.
Chercher à
passer outre à la volonté des militants/sympathisants de Nidaa Tounès provoquerait
forcément la faillite et l’implosion du mouvement
et nous ramènerait à la case départ post 14 janvier 2011 avec la suprématie des partis "peu" républicains.
Notre
silence pourrait être interprété comme une acceptation de fait par les
comploteurs qui cherchent à anéantir le mouvement Nidaa Tounès. Ce complot
ne vise pas seulement Nidaa Tounès mais la Tunisie toute entière.
Eclipser
Nidaa Tounès de la scène politique, même pour une courte période, équivaut
à : (i) une installation d’un Etat « SAMSAR » pour vendre le
pays à l’étranger. Déjà un « pays-ami » cherche à mettre la main sur
notre territoire à travers l’énergie renouvelable- solaire en particulier, (ii)
une Organisation militaire ayant somalisé plus d’un pays arabe se dépense pour obtenir des privilèges militaires sur le
Sud du pays pour servir à de futures agressions contre des pays frères ou amis,
(iii) des mafieux «d’Outre-Méditerranée »
ont pris la décision de tout racheter en Tunisie (chaines hôtelières,
industries, exploitations agricoles, exploitations
minières, etc.). L’Etat « SAMSAR» ferait tout pour faciliter l’OPA sur
notre pays en mettant en place un code d’investissement favorable à la mafia
internationale, un code de travail revisité empêchant toute action syndicale et
surtout un fort glissement du dinar par rapport aux principales devises.
Nidaa Tounès
est à la croisée des chemins. Il doit trouver sa propre voie et repousser
toutes les tentatives pouvant le vider
de ses ancrages bourguibiens. Il doit être à la hauteur de sa mission réformatrice.
Les dirigeants comme les militants doivent admettre que les intérêts du parti doivent passer avant le pouvoir et les
avantages en nature. Faire l’inverse, c’est perdre le parti et le pouvoir. La
démission de Lazhar AKRIMI, ministre sans portefeuille dans le gouvernement
ESSID pourrait ouvrir la voie à d’autres démissions traduisant une prise de
conscience du danger qui guette Nidaa Tounès.
Nidaa
Tounès, un concept valide et un projet
sociétal avant-gardiste, ne mourra jamais,
même si la version actuelle de ce mouvement pourrait connaitre des
difficultés, car le paysage politique tunisien a besoin d’un
mouvement épousant le projet national réformateur bourguibien actualisé.
Bourguibistes,
indignez-vous, soulevez-vous contre le
complot qui se tisse pour détruire Nidaa Tounès afin de faciliter la mainmise
totale d'un courant politique conservateur sur la Tunisie et faciliter par la suite une agression-somalisation contre
notre voisin de l’Ouest.
Je termine mon
propos par un proverbe africain : « Le chien a beau avoir quatre
pattes, il ne peut emprunter deux chemins à la fois ». La nomenklatura
de Nidaa Tounès et BCE doivent méditer
cette sagesse.
Monastir, le 15 Octobre 2015
Mustapha STAMBOULI, militant républicain.
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