Le constituant-député de Sfax pour le parti Afek Tounes a attaqué sans ménagement le gouvernement provisoire pour avoir annulé à
la dernière minute une programmation d’infrastructures de base au profit de la
ville de Sfax (CHU et plusieurs diffuseurs routiers).Il y a plusieurs mois un
panel de ministres vint informer les habitants de Sidi Bouzid de la
programmation d’un ensemble de projets dans la région. Les populations des
autres villes du gouvernorat, s'estimant
lésées par cette programmation hâtive, forcément inéquitable, ne prenant pas en
compte les besoins vitaux de la zone, se soulevèrent.
Ces deux exemples prouvent que la gouvernance centralisée à
partir de la Capitale est rejetée par les populations des régions et des communes.
Vouloir persister dans cette direction, c’est ramer contre courant et bloquer
in fine le développement du pays et son efficacité économique. Aucun
gouvernement ne pourra imposer des choix préfabriqués et partisans à moins de
réinstaller une nouvelle dictature. Hypothèse impossible après le 14 janvier
2011. Le peuple n’acceptera plus sa mise sous tutelle quelque soit le motif. L’Etat
central est remis en cause et contesté dans ses décisions de planification, de programmation
et d’arbitrage.
Sommes-nous condamnés à subir un modèle d’organisation
administrative et économique critiqué de tout bord et rejeté aussi bien par les
régions de l’Intérieur que par les régions du Littoral ? Le pouvoir
central est accusé, à juste titre, de dépenser l’essentiel des fonds publics pour
des projets concernant la région-capitale
dans le but de résoudre les problèmes de
surpopulation et de transport. Il est temps de mettre à plat toutes les
questions d’organisation et d’aménagement du territoire. Investir sans avoir
une vision claire revient à gaspiller l’argent du peuple.
Pour redonner du sens à la vie en commun, il faudrait mettre
en place une gouvernance républicaine basée sur l'implication du peuple dans la
prise de décision. Ce processus pourrait être organisé selon de nouveaux modes
de pouvoir, de nouvelles pistes de représentativité et d'outils de
démocratie directe et participative avec un pouvoir local très engagé
dans la citoyenneté et le développement en sus de ses prérogatives en matière
de gestion de la Cité. Ce mode de gouvernance pourra, à terme,
réinstaurer la confiance entre le citoyen et les représentants politiques
et conforter son adhésion aux institutions républicaines.
L’abandon du centralisme au profit de la double
décentralisation régionale et locale peut constituer une piste de réflexion
pour une meilleure gouvernance et davantage d’équité.
Que signifie la décentralisation sinon le transfert de compétences de l'État à des
institutions distinctes et indépendantes ? Cependant l’Etat unitaire garde
des prorogatives fortes en matière de défense, politique étrangère, planification
stratégique, politique monétaire et législation nationale. Les politiques de
développement doivent être intégralement déplacées vers les régions et les
communes de même que les ressources.
Dans une optique décentralisatrice, l’Etat doit réviser sa planification
nationale pour être moins prescriptif, plus incitateur et régulateur. Pour
exercer pleinement ses fonctions stratégiques, l’Etat devrait adopter des
politiques de contrat-programmes dans ses relations avec les régions autonomes
et les communes.
Le transfert, le plus rapidement possible de la Capitale
vers le Centre du pays, constituerait un acte-phare. Ce Centre, une fois acquis
des potentialités économiques importantes et un système d’infrastructures
stratégiques performant, serait en mesure d’entrainer les régions de l’intérieur
(Kasserine, Sidi Bouzid) dans une dynamique et un processus de développement
effectif. Cette dynamisation du Centre favoriserait l’émergence d’une Métropole
internationale avec quatre appuis fondamentaux : (1) Kairouan comme capitale du
pays en remplacement de Tunis, (2) M’saken, plateforme logistique de premier
plan, (3) Sousse/Monastir / Mahdia pôle de développement touristique et de
services (4) Kasserine / Sidi Bouzid, zone de développement agricole et de
transformation. Cette Métropole, cœur de développement, pourrait entrainer dans
son sillage Gafsa et Siliana. Ce processus de délocalisation des activités de
la région de Tunis vers le Centre ne peut être que bénéfique pour le pays et
pour les finances publiques.
Le second acte fort de la décentralisation consiste à
confier aux régions l’arsenal de
l’apprentissage et de la formation professionnelle. Les régions sont les mieux placées
pour comprendre et analyser la problématique de l’emploi et de la formation en
fonction des besoins des entreprises implantées dans leur zone.
La mise en place progressive d’une fiscalité locale afin
d’assurer l’autonomie financière aux
régions et aux communes constitue la condition
nécessaire pour leur assurer une autonomie effective et viable.
Sur le plan institutionnel, les instances régionales doivent
être élues au suffrage universel. Le gouverneur, première autorité de la région
devra être élu directement par les citoyens pour être accepté et non contesté...
Les scènes de ces dernières semaines réclamant le «dégagement» de gouverneurs parachutés
d’en haut illustre le refus du centralisme bureaucratique et partisan.
Un Conseil économique, social, environnemental regroupant
les compétences régionales en matière de développement (CESER) doit être crée
afin de remplir une mission de consultation auprès des instances
politiques de la région. La saisie pour avis du CESER est obligatoire, avant
examen par le conseil régional des documents relatifs :
·
au projet de budget de la
région et de son bilan annuel d’exécution;
·
aux schémas régionaux
d’aménagement et de développement du territoire.
Pour conclure, notre système territorial malade nécessite
une intervention chirurgicale d’urgence. Faute de choix clairs et courageux,
l’autorité de l’Etat s’érode chaque jour un peu plus. Refuser ou reporter cette
décision de décentralisation intégrale signifie négligence et trahison envers
la République et l’Unité Nationale.
Avons-nous le choix de différer la réorganisation du
territoire tunisien sur la base du principe de subsidiarité impliquant les
citoyens et citoyennes directement ou indirectement dans la gestion territoriale
pour assurer le bien-être de tous et de toutes ?
Vive la République citoyenne.
Mustapha STAMBOULI
PS: Suite aux discussions sur Facebook, il nous a été donné de préciser le concept du transfer de la Capitale:
"Pour ceux qui s’inquièrent du transfert de la Capitale, je dirai ceci : (1) le transfert de la Capitale est une bonne action pour Tunis. Sa ceinture noire l'engloutira si on poursuit le rythme de croissance. La migration est inquiétante, avec 3 millions d’habitants le grand Tunis deviendra (10-12 ans) ingérable de tous points de vue, sécurité en particulier. Pour mettre à l’aise mes amis de Tunis, cette proposition n’est pas contre eux, au contraire. (2) Nombre de pays ont opté pour ce choix de transfert de la Capitale : Brésil, Turquie, Bénin, Afrique du Sud, Birmanie, Côte d’ivoire, Australie, Allemagne et bien d’autres. Tunis coûte très cher pour le contribuable tunisien. Si on veut stabiliser les populations de Sidi Bouzid, Kasserine, Siliana, Gafsa, Metlaoui, il faudra obligatoirement déplacer le centre de gravité du pays vers ces régions citées. Sinon, ces régions se déplaceront entièrement vers la région de Tunis, comme en Egypte au Caire au Mexique au Mexico, etc. Donc Mégapoles ingérables, creusets de misère et d’insécurité, d’inégalité, de pollutions diverses et fiefs de mafia. Quant aux transports, il ne sera plus possible de circuler à Tunis. Je vous invite à visiter le Caire et en reparlera."
PS: Suite aux discussions sur Facebook, il nous a été donné de préciser le concept du transfer de la Capitale:
"Pour ceux qui s’inquièrent du transfert de la Capitale, je dirai ceci : (1) le transfert de la Capitale est une bonne action pour Tunis. Sa ceinture noire l'engloutira si on poursuit le rythme de croissance. La migration est inquiétante, avec 3 millions d’habitants le grand Tunis deviendra (10-12 ans) ingérable de tous points de vue, sécurité en particulier. Pour mettre à l’aise mes amis de Tunis, cette proposition n’est pas contre eux, au contraire. (2) Nombre de pays ont opté pour ce choix de transfert de la Capitale : Brésil, Turquie, Bénin, Afrique du Sud, Birmanie, Côte d’ivoire, Australie, Allemagne et bien d’autres. Tunis coûte très cher pour le contribuable tunisien. Si on veut stabiliser les populations de Sidi Bouzid, Kasserine, Siliana, Gafsa, Metlaoui, il faudra obligatoirement déplacer le centre de gravité du pays vers ces régions citées. Sinon, ces régions se déplaceront entièrement vers la région de Tunis, comme en Egypte au Caire au Mexique au Mexico, etc. Donc Mégapoles ingérables, creusets de misère et d’insécurité, d’inégalité, de pollutions diverses et fiefs de mafia. Quant aux transports, il ne sera plus possible de circuler à Tunis. Je vous invite à visiter le Caire et en reparlera."