07 novembre 2025

Et si la solution n'était pas derrière les barreaux ?

 

Face à la surpopulation carcérale qui porte atteinte à la dignité humaine et compromet l’avenir, il est impératif de repenser nos fondements. Plutôt que de continuer à multiplier les incarcérations, nous devons privilégier des alternatives, renforcer l’accompagnement, l’éducation et la prévention. Inspirons-nous des modèles internationaux, tels que la réhabilitation en Norvège ou la justice préventive au Portugal, pour tracer une voie plus humaine, plus efficace et plus durable. Et si la justice se consacrait avant tout à restaurer le bien et à transformer des vies, plutôt qu’à simplement sanctionner le mal ?

La réinvention du système pénal : un impératif de justice sociale

L'incarcération de masse a montré ses limites. Bien plus qu’une simple question de politique pénale, cette problématique touche au cœur de nos valeurs humaines. La citation de Fiodor Dostoïevski trouve ici tout son sens : « La véritable mesure d’une société civilisée ne réside pas dans le nombre de ses prisons, mais dans celui de ses écoles, de ses bibliothèques et de ses dispensaires. » Cette réflexion doit guider notre démarche : une société véritablement civilisée ne se mesure pas à sa capacité à punir, mais à son engagement à prévenir la criminalité et à offrir des solutions constructives.

Aujourd’hui, le système pénitentiaire tunisien est à un carrefour. Confronté à une crise structurelle, il souffre d'une surpopulation chronique et de conditions de détention inhumaines. Les prisons tunisiennes fonctionnent à des taux d’occupation dépassant régulièrement les 120 %, parfois jusqu’à 200 % dans certains établissements. Cette situation, déjà dénoncée par les organisations de défense des droits humains, entraîne des conditions de vie déplorables : surpopulation, insalubrité, et manque d'infrastructures adaptées. En outre, le recours excessif à la détention provisoire aggrave ce phénomène, enfermant des individus dans des conditions préjudiciables, parfois avant même qu’ils aient été jugés.

Face à ce tableau préoccupant, il est évident que la réforme du système pénal s'impose. Les autorités tunisiennes ont bien tenté des solutions, telles que l’introduction du bracelet électronique pour désengorger les prisons. Cependant, ces initiatives restent insuffisantes pour résoudre l’ampleur de la crise. Il est grand temps de repenser notre approche de la justice pénale et d'explorer des alternatives plus humaines et plus efficaces.

Le modèle de la réhabilitation : des exemples internationaux à suivre

Loin d’être une utopie, des modèles alternatifs ont déjà fait leurs preuves ailleurs dans le monde. En Norvège, les prisons sont conçues comme des lieux de réhabilitation et non de punition. Le résultat ? Un taux de récidive parmi les plus bas au monde, autour de 20 %, contre environ 60 % dans d'autres pays où l'incarcération reste la norme. Ce modèle repose sur l’accompagnement psychologique, la formation professionnelle et l’éducation, permettant aux détenus de se réinsérer sereinement dans la société.

De même, en Finlande, le recours à des peines alternatives, telles que le travail communautaire ou la surveillance électronique, a permis de réduire considérablement la population carcérale tout en préservant la sécurité publique. Ce système, tout en limitant les coûts pour l'État, favorise une réinsertion réussie et réduit le risque de récidive.

Au Portugal, un modèle axé sur la prévention et le traitement, notamment pour les délits liés à la drogue, a radicalement transformé le système pénal. Là-bas, la répression a été remplacée par un soutien ciblé, ce qui a non seulement réduit les coûts sociaux, mais aussi amélioré la cohésion sociale en favorisant la réintégration des délinquants.

Le besoin d'une réforme globale en Tunisie

Ces exemples nous montrent qu'il est possible de réinventer notre système pénal en adoptant des alternatives à l’incarcération, favorisant l'éducation, la réinsertion et la prévention plutôt que la punition pure et simple. Mais pour que cette transformation devienne une réalité, il est essentiel d’agir rapidement.

En Tunisie, l'urgence est palpable. L’un des obstacles majeurs reste la dépendance excessive à l’incarcération préventive, qui entraîne des drames humains et sociaux. Ce système non seulement nuit à l’individu, mais aussi à la société, car il enferme des personnes dans des situations qui favorisent leur marginalisation et leur radicalisation. L'incarcération devrait être une solution ultime, et non la première option pour des délits mineurs ou des prévenus en attente de jugement.

La solution réside dans une refonte globale du système pénal tunisien. Un investissement dans l’éducation, le soutien psychologique, les formations professionnelles et les programmes de réinsertion pourrait non seulement alléger la surpopulation carcérale, mais aussi aider à prévenir la criminalité avant qu'elle n’éclate. Plutôt que de punir, il est plus judicieux d’accompagner, d’éduquer et de réintégrer.

Un appel à l’action : réinventer la justice pour construire un avenir meilleur

Il est temps d'oser la réforme. Il est temps de remettre en question les pratiques actuelles et d’investir dans un système plus humain. Un système où la réhabilitation prend le pas sur la punition, et où la prévention devient la priorité. Il est crucial de sensibiliser les décideurs, les acteurs de la société civile et le public à cette nécessité de transformation.

Comme l’a dit Simone Veil : « Le but de la justice n'est pas de punir le mal, mais de rétablir le bien. » Cette citation doit guider notre réflexion. Il est de notre responsabilité collective d’imaginer un système pénal qui respecte la dignité humaine tout en assurant la sécurité et la cohésion sociale.

Nous devons nous inspirer des exemples internationaux et faire en sorte que la Tunisie prenne le chemin de la réhabilitation, de la prévention et de l’éducation. Un avenir sans prisons surpeuplées, sans déshumanisation, mais avec des solutions réalistes, humaines et pérennes.

Mustapha STAMBOULI

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