Triste,
parce que nous avons maintenant la certitude que le régime islamiste est fascisant
et que la junte policière anti-émeute s’est comportée d’une manière non
républicaine. Comment peut-on expliquer la violence avec laquelle ont été
traités les manifestants et manifestantes paisibles venus de toutes les régions
de la République pour commémorer la journée des Martyrs. Même si ce rassemblement n’était pas autorisé
et l’Avenue Habib Bourguiba interdite
abusivement par une autorité peu familiarisée avec la prise de décision et ignorante de
l’Histoire de la libération de la Tunisie, tous les observateurs tunisiens et étrangers ont qualifié cette violence de disproportionnée à tel point qu’on se serait cru en territoire
occupé ! La décision d’interdire l’Avenue Habib Bourguiba aux
manifestations est abusive, ce qui
justifie en droit son non respect d’autant plus que l’arrêté d’interdiction, s’il
existe, n’a pas été publié au journal officiel.
Comment
peut-on accepter l’humiliation et l’agression des représentants de la Ligue des
droits de l’Homme, de quelques figures de la société civile et des constituants
venus briser l’interdiction en manifestant leur solidarité avec les
manifestants ? Comment peut-on accepter, après le 14 janvier 2011, la
présence d’une milice pro-gouvernementale à côté de la police pour agresser les
manifestants ? Comment la police va-t-elle justifier l’agression commise à l’encontre de la journaliste de l’hebdomadaire français Le Point ? Les tunisiens ont vécu ce
lundi 9 avril 2012 une journée sombre avec son lot de morts et de blessés. Une barbarie,
une infamie !
Même
si la manifestation n’a pas réalisé ses objectifs comme ce fut le cas le 20
Mars dernier à l’occasion de la fête de l’Indépendance, les manifestants
portant des drapeaux tunisiens ont pu crier à la face des lanceurs de bombes lacrymogènes: "ni peur, ni terreur, l'avenue appartient au peuple",
"Dégage! Dégage!", slogan du 14 janvier.
Triste
encore, parce que la fête a été gâchée et massacrée. Les jeunes
et moins jeunes se sont rassemblés, nombreux, précisément à cette Avenue
symbolique chargée de l’histoire de la résistance et de la contestation
pour «la journée des martyrs», en souvenir de la répression
sanglante par les troupes françaises d'une manifestation à Tunis le 9 avril
1938. Aujourd’hui, des jeunes bouzidiens , venus, à pied de Sidi Bouzid à Tunis après une longue marche de plusieurs journées,
épuisés mais déterminés pour commémorer cet évènement majeur dans l’Histoire de
la Tunisie, ont été lâchement réprimés. Quelle déception et quel désenchantement ! Nos jeunes sont sous le choc et ne comprennent
pas ce qui se passe. Personne ne pouvait songer revoir une telle violence, assister
à de telles scènes de barbarie et de
sauvagerie ! Ils sont rentrés, tête basse, chargés de haine, maudissant le
23 octobre 2011, journée des élections de la Constituante !
Triste enfin, car on a
découvert à notre stupéfaction et grand désarroi,
l’absence de préparation et d’organisation de cet évènement. Le mot d’ordre a
circulé sur les médias sociaux sans contrepartie sur le terrain. Les
organisateurs ont brillé par leur absence ! Ni les militants des partis,
ni ceux de l’UGTT n’étaient présents pour encadrer une telle manifestation
redoutée, à haut risque. Comment peut-on expliquer une telle gabegie et un tel laxisme, synonymes d’irresponsabilité
et d’amateurisme - d’où les dégâts
corporels subis par les manifestants et manifestantes.
Que fait Marzouki dans son palais alors que des tunisiens et tunisiennes subissent une répression
sauvage de la part d’hommes censés les protéger et les encadrer ? Que fait
Ben Jaafar en tant que président de la Constituante pour préserver les acquis
de la Révolution ? Pourquoi ces deux présidents n’ont-ils pas riposté à la confiscation de l’Avenue Habib
Bourguiba ?
Le Ministre de l’Intérieur, responsable du drame, doit
démissionner au plus vite et que la justice instruise sans tarder les crimes commis
aujourd’hui et punisse les coupables, ceux qui ont exécuté la basse besogne et
ceux qui ont donné les ordres de réprimer.
La population a vite réagi après
le drame de Tunis. Les habitants de Monastir et d’autres villes de l’intérieur sont sortis manifester
nombreux à l’annonce du décès des jeunes martyrs pour condamner les actes de violence gratuits
et brutaux.
La Troïka doit tirer les conclusions de son incompétence à
gérer des situations sécuritaires. Il ne lui reste qu’à déposer son bilan et
dégager du paysage politique de la Tunisie à jamais.
Mustapha STAMBOULI, républicain
Mustapha STAMBOULI, républicain