« Le chien a beau avoir quatre pattes, il ne peut
emprunter deux chemins à la fois » sagesse africaine.
Après le peuple libyen, le peuple malien : en effet,
dans le sillage de la décomposition et du délitement de la Libye, voilà le Mali
frappé de plein fouet, menacé dans sa souveraineté, son indépendance et son
intégrité territoriale. Les armes de Kadhafi sont entre les mains d’Al-Qaïda et
des islamistes-jihadistes qui n’hésiteront pas à semer la terreur et
imposer des règles barbares aux
populations paisibles du Sahel africain.
Les rebelles touaregs du Mouvement national de libération de
l'Azawad (MNLA) profitant du désordre total provoqué par le coup d’Etat
au Mali gagnent du terrain et installent
un Emirat islamique dans le territoire qu'ils occupent situé au nord du Mali avec
l’assistance des terroristes d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) et d’autres
factions venues de l’Algérie, de la Libye et de la Tunisie. Pourquoi les pays
africains et l’Occident ne réagissent-ils pas à cet affront-défi humiliant ?
L’Algérie, pays voisin du Mali, concernée en premier chef par cet effritement
malien, reste, en apparence, discrète voire paralysée, attitude-positionnement
d’autant plus surprenante que ses ressortissants du consulat de Tombouctou ont
été pris en otage par ces séparatistes.
Pourquoi l’Algérie ne prend-t-elle pas l’initiative de
réunir un sommet des Chefs d’Etats des pays voisins du Mali afin de traiter
cette crise et de prêter main forte, si nécessaire, au pouvoir légitime de
Bamako ? L’Algérie serait-elle intéressée par l’éclatement du Mali pour mieux
contrôler ses frontières ? Paradoxe difficile à saisir. Si cette thèse se
confirme, l’Algérie joue ainsi avec le feu. Le silence algérien est inquiétant sinon
déstabilisant et nous rappelle la position ambigüe du gouvernement algérien
lors de la révolte libyenne. Une stratégie opportuniste, si tel est le cas, ne constitue pas une bonne logique à moyen et
long termes.
L’AQMI, agrégat d’anciens membres du groupe islamiste armé
(GIA) et d’anciens membres des forces armées algériennes n’obéit –elle pas aux
ordres des militaires algériens ? Cette stratégie de création d’un foyer
de tension chez les voisins maliens pourrait-elle donner du temps et un répit au régime algérien
occupé par les élections du 10 Mai prochain et son lot d’incertitudes ? En
effet, les groupes algériens sont chargés d’aider le MNLA dans sa lutte pour l’installation
d’un Etat islamiste.
L’Algérie, refusant de saisir toutes les données
géopolitiques et géostratégiques évidentes et en filigrane, joue à la politique
de l’autruche, accepte cet état de fait tout en influençant par des touches
insignifiantes le déroulement des évènements dans la région afin de tirer le
maximum de profit plus tard ou de retarder le jour « J » de son
«printemps arabe» promis par Bernard-Henri Lévy, sous-traitant exclusif
pour le déclenchement des révoltes.
Si l’Algérie croit à l’adage « chacun pour soi et dieu
pour tous», elle se trompe sur tous les plans car le projet de déstabilisation
de l’Afrique et de son éclatement en Etats minuscules constitue un
plan-programme unique et global qui touchera toute l’Afrique. Aucun pays
n’échappera à cette fatalité, fût-ce l’Algérie puissante et riche. L’exemple
libyen est présent encore dans nos esprits pour nous renseigner sur la stratégie de nos ennemis qui
cherchent à nous marginaliser et exploiter nos richesses humaines et souterraines
pour leur confort matériel.
L’Algérie doit comprendre que sa sécurité se joue à
l’extérieur et non à l’intérieur. Si elle continue à hésiter à se vacciner, le
virus du «printemps arabe» et de la conspiration sioniste l’atteindra
profondément et définitivement. Le Mali est la dernière étape avant l’assaut
final contre l’Algérie et son intégrité territoriale. L’Algérie n’est pas la
Syrie. Elle ne dispose pas d’un allié comme le Hezbollah pour lui prêter main
forte, le cas échéant. Ses 6.385 km de frontières sont difficiles à sécuriser car
poreuses d’autant plus que ses voisins libyens et maliens ne répondent plus à
l’appel.
Seuls l’Algérie et les pays de la CEDEAO sont à même de
pousser les protagonistes maliens vers
un processus de dialogue et de négociation afin de trouver de toute
urgence une solution pérenne qui
préserverait des vies humaines de même que
les intérêts du peuple malien et ceux de leurs voisins. L’attentisme
renforce l’insécurité de la sous-région, il met en jeu l’indépendance voire l’existence
des Etats.
La CDEAO reproduit-elle le scénario écrit par la ligue des
Etats arabes lors des crises libyenne et syrienne ? La CDEAO doit renoncer
à ce jeu malsain de punitions collectives
qui ne mène à rien sauf à aggraver la situation humanitaire du peuple
malien. La consœur de la ligue arabe est invitée à apporter son soutien au
régime malien pour mater les rebelles touaregs indépendantistes du MNLA. Les
dirigeants de la CDEAO doivent comprendre que les pays africains seront
confrontés un par un à leur propre version de rébellion ou de révolte.
L’Afrique est convoitée
pour ses richesses minières et
surtout ses terres arables et ses conditions climatiques favorables pour produire
des aliments, du fourrage ou des agro-carburants essentiellement destinés à
l'exportation. Les multinationales golfiques investissent sans retenue dans ce créneau porteur et
risquent de mettre en péril l’indépendance des pays africains et favoriser une nouvelle forme de colonialisme. A Madagascar et au Kenya, ce phénomène a déjà
créé des troubles sociaux et politiques.
Les africains doivent intérioriser l’idée que l’Afrique est le Continent de l’avenir. Il renferme
des réserves immenses (humaines,
richesses matérielles, croissance …) et tous les espoirs, car le progrès et la prospérité de la planète
dépendent de notre Continent. L’Afrique doit retrouver sa place dans un monde changeant,
bouleversé par la crise du système économique capitaliste, ultra-libéral. L’Afrique
ne peut pas continuer à jouer le rôle non souhaité du «dindon de la farce» pour
servir les intérêts de l’Occident et du sionisme international. L’avenir de
l’Afrique appartient à une Afrique solidaire et non divisée.
L’Union Africaine, comme La ligue Arabe, deux institutions
fantoches, coûteuses et inefficaces devraient disparaître pour faire place à
d’autres formes de coopération et de coordination entre les pays africains.
L’Afrique des citoyens doit s’imposer en lieu et place de l’Afrique des présidents.
La forme institutionnelle et le contenu d’une telle plateforme d’échanges et de
solidarité pourrait être arrêtée suite à
une rencontre des élites africaines, progressistes et intègres.
Le Mali dans la tourmente risque d’imploser si la solidarité
africaine ne se concrétise pas maintenant. L’Afrique entière aura du mal à
survivre à l’éclatement de la Libye et du Mali. Souhaitons que l’Afrique des
peuples refuse une nouvelle aventure coloniale et fasse échouer ce complot
diabolique visant le retour d’un esclavagisme des temps modernes.
Je termine par un proverbe bien africain «Celui qui rame
dans le sens du courant fait rire les crocodiles».
Mustapha STAMBOULI, républicain, alter mondialiste