Le Mouvement Nidaa
Tounès s’est imposé sur la scène politique comme étant un parti de masse
pouvant rivaliser avec celui des islamistes. Comment ce mouvement est-t-il
arrivé, en l’espace de quelques mois, à conquérir une large base sachant qu’il a une offre
politique diverse et variée ? La présence de BCE à la tête de ce parti explique-elle
cet engouement ? L’appartenance de ce dernier à la famille bourguibienne
est-il l’élément fondamental qui a
déclenché chez les tunisiens et tunisiennes ce désir d’appartenir à cette
formation et voter pour elle le jour J ? Si c’est le cas, il faut rendre à
César ce qui appartient à César !
Face à cet
engouement populaire, on relève une frilosité des dirigeants de ce mouvement
qui cherchent par tous les moyens à mettre la mainmise sur toutes les
structures du parti au point qu’on se croirait chez le défunt Parti Communiste Tunisien (PCT)
où tout est décidé par le chef et la
nomenclature du parti. Pourtant, même les partis communistes léninistes croyaient
dans le « centralisme démocratique» qui laisse une marge aux structures
locales et régionales pour élire démocratiquement leurs délégués nationaux pour
le congrès. Rien de cela à Nidaa Tounès, du moins pour le moment : que des
parachutages et une improvisation sans équivalent. Ceci est dûment constaté à
Monastir, ce qui pousse la base de cette région à remettre en cause les
décisions du «Politburo» de Nidaa Tounès.
L’installation
des responsables régionaux ce samedi 11 novembre a déclenché une insubordination, un boycott
du meeting et un appel au gel des activités de ce mouvement dans la région.
Nous invitons les responsables de ce parti à prendre contact avec les militants
et sympathisants pour se rendre compte de l’état de désastre causé par cette
réunion clandestine organisée dans la
zone touristique à une dizaine de kilomètres du Centre-ville ! Les
Monastiriens vivent cet évènement comme une trahison et un manque de
respect à la population qui a boosté la
grande réunion du 24 Mars 2012.
Il est tout à
fait normal que les militants exigent une transparence dans la nomination des
premiers responsables locaux, régionaux
ainsi que de leurs délégués aux structures centrales afin d’éviter de fausser
la représentation à tous les niveaux sachant que ce mouvement est une mosaïque regroupant
Bourguibistes, syndicalistes, transfuges du Massar, etc…
Nidaa Tounès doit
réviser sa stratégie organisationnelle et renoncer au diktat de désignation et
laisser les militants et militantes choisir, par des procédures démocratiques,
leurs responsables et délégués à tous les niveaux. Les Tunisiens ne veulent
plus revivre le cauchemar du culte de la personnalité et la
dictature du «Politburo».
Nidaa
Tounès doit comprendre que le citoyen tunisien a changé complètement et qu’il
est le maître de la situation. Rien ne se fera sans lui ou contre lui. La
démarche de toute action publique doit être obligatoirement participative et
intégralement décentralisée. Pourquoi le «Politburo» s’occupe-t-il des affaires locales et
régionales du mouvement ?
Ce n’est pas une autorisation administrative délivrée
par une administration sous contrôle islamiste (visa du parti) qui doit tout agencer. Un comble après le 14 Janvier
2011 ! Le mouvement doit accepter
le principe de subsidiarité pour organiser le parti. Le «Politburo» doit s’occuper des choses essentielles au
niveau des stratégies et programmes afin de se préparer pour diriger le pays,
une fois remontés les desiderata de la base.
Nidaa Tounès, évènement majeur dans
la vie politique tunisienne, mérite une vision claire, une structuration
optimale et démocratique, une stratégie intelligente pour redresser le pays sur
tous les plans. Pour cela, nous invitons le directoire provisoire à mettre en
place une structure de réflexion sous forme d’un Centre d’Études, d’analyse et
de prospective afin d’apporter réflexions et solutions pour les problèmes
cruciaux de la Tunisie.
Toutes les initiatives pour maquiller
la réalité ne peuvent résister aux fondamentaux du terrain. Ni un élargissement
du comité provisoire, ni une révision des listes des représentants locaux ne
peuvent nous faire oublier un principe fondamental : celui des élections à
tous les niveaux (local, régional et central). Les élections nationales
(parlementaires et présidentielles) n’auront pas lieu, dans tous les cas de
figures, avant 2014. Alors pourquoi vouloir construire à la hâte du provisoire
quand on a le temps pour faire du définitif et du solide ?
Pour clarifier les esprits, nous
souhaitons avoir : (1) un règlement
intérieur provisoire pour jalonner le fonctionnement du mouvement, (2) une
direction compétente du parti pour mieux gérer les affaires au quotidien, (3)
des élections justes, transparentes et démocratiques pour élire les
représentants locaux et régionaux, (4) une date pour la tenue du congrès du
mouvement afin d’arrêter plus particulièrement : références
politiques du mouvement, choix stratégiques en matière économique et
d’organisation territoriale, projet sociétal er alliances stratégiques à nouer
ou à renforcer avec nos partenaires.
Il est temps de corriger la
trajectoire pour ne pas faire fausse route, nuisible pour le mouvement mais
surtout pour la Tunisie. Pour que l’Appel de Tunisie soit entendu, la structure
dirigeante provisoire doit écouter sa base et en tenir compte !
Mustapha STAMBOULI